Les meilleurs films de 2022 selon Nathan_E-B

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Qui l'eût cru? Paul Thomas Anderson de retour avec une comédie romantique. Une rom-com qu'il ose même ouvrir et conclure avec l'incipit et excipit traditionnels, pour ne pas dire ultra-stéréotypés (je ne spoile rien, mais sachez juste que les amoureux de ses travelings ne seront pas déçus). Mais ce qui fait de Licorice Pizza une œuvre au label PTA indubitablement brocardée sur le torse, ce sont ces deux heures entre les deux, où il construit un film fragmenté, quasi à sketches, multiplie les fausses pistes, provoque le rire décalé, le tout sous le soleil californien des 70's. Une odyssée adolescente à la fois tête-en-l'air et magistrale, à l'image de cette séquence unique de rétro-conduite de poids lourd en pleine nuit.

Qu'on ne s'y trompe pas: Licorice Pizza est une comédie, une comédie certes si cynique qu'il faut une bonne heure pour s'en rendre compte. Toujours cette science du traveling, et si les dérapages contrôlés et les accès de comédie n'ont jamais ait peur à PTA, c'est bien la première fois qu'il expose avec, qu'il risque le plus de se faire méprendre. Ce sont pourtant ces chemins de traverse qui font réellement de cet opus le grand film qu'il est, du même auteur que les plus sombres There Will Be Blood ou The Master.

Si le titre "Licorice Pizza" fait apparemment référence au vinyles de sa fabuleuse BO, il annonce semble-t-il également la saveur du cru 2022: fruit d'un subtil et casse-gueule équilibre entre comédie/rom com populaire estivale à slapstistcks -c'est la face pizza- et de notes plus délicates, incongrues, aromatiques et auteuristiques -la face réglisse-. Bipolarité à l'image de cette relation en zigzag, hésitant entre iration et agacement, à l'origine de grandes séquences de chassé-croisé.

Équilibre donc, entre moments gracieux: une main qui se suspend au-dessus d'un sein, des jeunes garçons autour d'un camion à l'arrêt alors que la nuit peine à quitter la vallée de San Fernando, l'expression indéchiffrable d'un jeune homme confronté au doute; et comiques, fourrés d'un florilège de répliques d'humour absurde d'une finesse désemparante:

-Tu es une putain de battante, n'est-ce pas? Je peux le voir. Tu t'es faite toute jolie pour venir ici, mais en réalité tu me rappelles plus...un chien. Un pitbull anglais avec du sex-appeal et un nez très juif.

-Je te révélerai des secrets de mon intimité que je n'ai révélé à personne. Mais ne me demande rien de Kuala Lampur.
-Je ne comprends rien à ce que tu dis. Mais je suis sexy, non?

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A plein temps est un film magistral, le meilleur film social de ces dernières années qui en fournirent pléthore, et aussi surprenant soit-il, un formidable thriller. Eric Gravais nous prend aux tripes, les serre, les compresse, et sans aucun misérabilisme, capture ce mot rabattu de précarité dans une capsule de 1h27, générique compris. Une course contre la montre haletante, montée avec un rythme implacable, qu'une ambiance sonore faites de basses électriques à la Reznor-Ross tend comme une corde à linge. C'est aussi un film sur le courage, celui d'une femme qui doit faire face à un très habile enchevêtrement d'éléments destructeurs. Laure Calamy est tout simplement époustouflante, incarne chaque dégradé de ce survival en pleine métropole avec une justesse remarquable, joue avec son visage et son corps avec une maîtrise plus que professionelle, noue en un temps record une connexion empathique avec le spectateur qui rumine tout : remords, stress, frustration, effarement, honte, et prie ciel et terre pour que cette foutue Lacroix lui accorde ce poste dont elle a tant envie et besoin.

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C'est toujours le même problème avec Del Toro: à force de toujours se laisser embuer par sa ion des monstres, il tend à par trop les sublimer. On devait s'y attendre quand le casting fabuleux fut annoncé, mais il faut concéder au Mexicain qu'il lutte avec son amour: Nightmare Alley, qui, sciemment ou non, joue avec la frontière de l'artifice, du fake, provoque quand même les émotions du cinéma grandiloquent qu'il s'acharne, avec tant de méticulosité et dans une esthétique si léchée, à ressuciter et ne fait pas de fausses promesses: on sait dès le début que cette histoire ne finira pas bien. Et quand cette fin arrive, aussi désespérée, pessimiste et lucide que le récit qui l'avait annoncé, on ne peut qu'apprécier bon gré-mal gré la sombreur de l'aventure cauchemardesque que nous a présenté le Prince du Monde Tordu.

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Dans le tiroir "film à concept", The Chef est un plaisir de réalisation, une performance live jouissive et stressante. Des bons vieux enjeux humains tels qu'on les connaît, mais si bien emballés. Trop gourmand, j'ai voulu retrouver la chamade qu'avait battu mon cœur, mais la deuxième fois, l'esprit n'a pu s'empêcher de jouer les rabat-joie...

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Coupez! est une excellente surprise cannoise. S'il s'agit d'un remake, on y trouve tous les thèmes et gimmicks chers à Michel Hazanavicius: tout d'abord, et c'est au premier plan, la confection d'un film, les références cinéphiliques, la mise en abyme (film dans le film) et la superbe pastiche (couleurs hypersaturées, jeu surréaliste des acteurs) ; mais aussi, et en vrac, l'humour troisième degré (jeux de mots ostensiblement mauvais et déplacés, "Je ne veux pas, Ken"), jeu autour des clichés nationaux, personnages narcissiques, le goût du défi technique, Bérénice Béjo...
Surprenant, amusant, très accrocheur, impeccablement rythmé, et au final jubilatoire et presque touchant, c'est une très belle réussite et une superbe idée d'ouverture pour Cannes

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Si Adam Leon cède au vice de ce que quelqu'un appelle 'se regarder filmer', cette petite virée new-yorkaise n'est pas sans qualité; elle rappelle l'univers urbain et flottant d'une nouvelle de Paul Auster et distille une véritable ambiance fantômatique, notamment grâce à son travail du design sonore. La pourtant douée Vanessa Kirby n'y est qu'à moitié crédible dans son rôle d'ahurie aux yeux écarquillés, manquant d'un scénario auquel se raccrocher.
Mais il est vrai que je pardonne beaucoup plus facilement un montage aussi aléatoire quand la photo est aussi jolie... Ces couleurs vibrantes, chatoyantes, hypersaturées, rappellent la palette d'un Moonlight: il ne m'en faut pas beaucoup plus pour me charmer: chic et néon comme un clip de rock de Winding Roefn.

Et puis le film, sans jamais complètement perdre le fil de son syle, prend un tour quasi documentaire alors que l'héroïne décide de er du temps en compagnie de jeunes adultes. Ces échanges authentiques sont beaux et tendres, et la véritable réussite de ces "études italiennes".

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Ali Abassi réussit son thriller, un polar poisseux, frontal, louchant du côté du Zodiac. Mais le thriller d'Ali Abassi est plus un documentaire romancé qu'une fiction réaliste. En adoptant un ton aussi naturaliste que possible, en ne faisant pas le choix évident de faire de l'investigatrice l'héroïne du film, en s'immergeant complètement depuis le point de vue du meurtrier, la plongée dans cette série de meurtres iranienne a le mérite de poser son sujet et de poser les questions qui dérangent... et dispose d'une scène finale proprement glaçante...Abassi disait en interview qu'il s'agit plus d'un film sur la culture du meurtre que sur le meurtre, et c'est bien en cela qu'il se distingue. Vous ne pourrez plus dire que vous n'étiez pas prévenu...

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Matt Reeves a tenu ses promesses, et fabriqué un film Batman plutôt unique, contemplatif et d'ambiance, en travaillant sur un rythme étiré et de belles images, et dont les trois heures ne se sentent pas. Le film est cependant loin d'être exempt d'un lot d'imperfections et de grossièretés scénaristique (un 4e acte qui s'effondre lamentablement et des faux raccord et incohérences à vau-l'eau) qui ne l'empêchent pas de se démarquer par son ton au sein d'une marée de blockbusters finis à la va-vite.

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Good Luck, Leo Grande est un film assez unique, didactique, et presque touchant. Un huis clos qui traite yeux dans les yeux des tabous de la sexualité, sans impudicité, et va au fond de son sujet, le talque, le masse pour en découvrir les zones douloureuses. Est-ce là ce qu'on appelle le female gaze?

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Si Hers parvient toujours à sa fin - une sentimentalité et une douceur autant originales que surprenamment agréables -, cet opus paraît un peu moins brut, moins évident qu'Amanda. Une toujours bien belle échappée, mais peut-être ne s'affranchissant pas assez des archétypes qu'elle emprunte...

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Andrew Dominik avait annoncé plusieurs mois à l'avance que son film "allait choquer tout le monde". Pas sûr qu'il y ait là matière à fanfaronner. Si l'exécution est plutôt réussie (une esthétique plutôt léchée), le rendu global est effecivement malaisant, sale, et la belle bande-son de Nick Cave ne parvient pas à donner un sens de dignité à ce biopic-vampire qui fait son bonheur de la malheureuse vie de l'icone américaine.