Le double sens du titre de ce cinquième album des Magnetic Fields est assez révélateur de l'humour grinçant de Stephin Merritt : Get Lost, qui se traduit littéralement par "se perdre", veut aussi dire "va te faire voir" lorsque cela est proféré avec beaucoup moins d'égard en recourant au mode impératif. Mais inutile de se perdre en conjectures. Il est bien ici question de la seconde acception lorsqu'on écoute les épanchements mélancoliques et les déclarations amères de désamour qui animent la plupart des chansons ; des chansons habitées par des motifs obsédants. Les larmes et la pluie, poncifs pourtant usés jusqu'à la corde, trouvent avec Stephin Merritt, une dimension intensément prégnante. Quant à la lune ("Moon" sonnant plus juste), elle revient en leitmotiv pour tracer dans la nuit, comme à l'encre, des points de suspension. Car les chansons de Stephin Merritt sont suspendues à des fils, elles progressent comme des trains surannés haletant à travers la nuit jusqu'à ne plus trouver au matin le moindre souffle pour un adieu. "And you can't find the breath to whisper goodbye".
Le dernier titre de l'album ne pouvait pas mieux clore ce voyage émotionnel de 40 minutes. The Dreaming Moon appartait pourtant comme une réminiscence, un morceau échoué, de l'album the Charm of the Highway Strip sorti l'année précédente. Comme si l'unité apparente n'était qu'un fragment d'un ensemble plus étendu : l'œuvre prolifique, protéiforme et itérative de ces champs magnétiques.