Malgré le discrédit qu'est tombé le mot « rap » par la manière abusive et tortionnaire dont il a été prodigué dans ces temps de douloureuse musique, il est nécessaire de l'employer ici tant le sujet est imprégné par sa culture et ses codes.
La clamitation méphitique des pourceaux que l'on a en guise de média rap nous annonce un austère destin de la musique ; ou, plutôt, de son mode de consommation. La loi du marché croise ostensiblement l’œuvre d'art et nous ent à déjeter notre sensibilité afin de nous transformer en pauvre et bête consommateur. Les dilettantes derrière un média rap sont en réalité que des souillons faisandés, mobilisant leur vice - enseigné dans leurs écoles de commerce de merde - qui consiste à sucer le jonc de l'Art et l'apocoloquintoser dans le but de revendre son écorce au marché.
Vald étant debout, nuls d'entre eux n'osèrent exhaler contre lui le plus petit souffle. D'une prudence ingénieuse, notre rappeur construisit une antichambre au niveau des plus hautes crues de l'immondice des médias rap afin d'en ressortir avec un éclat de soleil à prendre en vigueur : « Pandemonium ».
L'ensemble de cette pièce d'où sont tirés 21 morceaux, donne l'idée d'un impétueux orphéon des cieux tamisée par la Voie lactée et apaisé, jusqu'à la plus volée des euphonies, par l'éburnéen capiton des nues.
Vald est un si singulier rappeur qu'il en devient difficilement classable : rap « troll », rap « complotiste », rap « iencli ». Quand on est assez infortuné pour aimer le grand Art, il nous importe d'étiqueter ou de définir ce qui fait secouer notre âme sensible ; consentons à l'art de s'exprimer par lui-même.
Vald s'échine à décrire de manière hallucinée et très démiurgique, très visuelle et astronomique, l'indéchiffrable et l’innommable balayure du monde. Il nous restera alors qu'à pleurer au sein de cette abstraction lyrique et le remercier de la sorte : « J'ai eu faim et tu M'as donné à manger, j'ai eu soif et tu M'as donné à boire, J'étais étranger et tu M'as donné l'hospitalité ». Ceux qui s'y refont feront preuve de racisme anti-blanc.
D'ordinaire, je ne me sens pas troublé à l'écoute d'un album, mais j'ai senti tout le poids et la tristesse du racisme que notre artiste-martyr fait réveiller en soupirant dans la frondaison de la forêt romantique la chaste souf d'une société rongée de névroses et fiancée aux véronals.
Les Fleurs du mal et les Poèmes saturniens paraissent, à côté de Pandemonium, calcinés. L'auteur des 21 morceaux met sa confiance dans le désespoir, qui lui est fidèle, pour nous offrir une poésie, une supplication et, par antinomie, un hosanna. Il nous reste plus qu'à saluer l'artiste, il nous reste plus qu'à saluer le Eminem français.