Quelles seraient les 100 choses que vous feriez avant de devenir un zombie ? Si vous avez des idées en tête, venez les comparer à celles d'Akira (aucun lien, fils unique) dans la dernière œuvre (en cours) de Haro Asô (Alice in Borderland) associé à Kotaro Takata (au dessin).
De l’exploitation de l’Homme par l’Homme…
Akira Tendô, 24 ans, n’est ni chômeur ni freeter. Il aligne les heures depuis trois ans dans une grosse boîte de pubs. Aliéné par le travail, écrasé par une pression a priori implacable pour obtenir de bons résultats, son existence se résume à des nuits souvent blanches, des poches sous les yeux et un logement délaissé.
Ça se e comme ça dans son « entreprise/société esclavagiste ». Tout le monde est soumis au même régime et compare son nombre d’heures sup’ réalisées, son état de fatigue… Ce jeu entre travailleurs produit le consentement de ces derniers à réaliser ce qui est attendu par l’entreprise.
… à la libération de l’Homme par le Zombie
Heureusement (?) un beau matin, les zombies ont débarqué ! Devant l’étendue du désastre Akira se rend compte de la bonne nouvelle : il n’a plus besoin d’aller travailler et peut, enfin, profiter de la vie ! Entre ménage, gorgées de bière… il n’aspire qu’à une vie « normale », symbolisée par la liste des choses à faire qu’il établit, dans un environnement qui ne l’est plus. Le premier tome se termine d’ailleurs sur des retrouvailles avec son meilleur ami Kencho.
Ce sera d’ailleurs un point de regret : le fait que les trois chapitres composant le tome n’aillent pas plus loin que ça. Cela manque un peu de dynamisme et de rebondissements pour une entrée en matière. Surtout que Shizuka Mikazuki (la femme qui figure sur la jaquette du tome) est réduite à quelques échanges et plans suggestifs pas forcément centraux pour la série.
Ce livre peut-il nous sauver la vie ?
Le manga est présenté comme « un récit post-apocalyptique totalement décalé et drôle » avec un « côté série Z irrésistiblement savoureux », ce qui n’empêche pas d’en proposer quelques clés de lecture. Une première renvoie aux décalages multiples qu’instaure le manga. Décalages qui tournent autour du personnage principal qui veut vivre une vie normale dans un environnement qui ne l’est pas.
Une seconde concerne la thématique du zombie qui n’est, cela ne surprendra pas grand monde, pas si anodine que cela. Leur longue histoire tend à en faire une des figures des angoisses des époques où ils apparaissent. Les zombies des années 2000 seraient ainsi l’incarnation de notre pessimisme et, notamment, du sentiment que nous serions au bord de retourner à l’état de nature, ce qui risque de se produire dans Bucket list of the dead.
Une troisième nous conduit à la critique du monde du travail japonais. Congés payés non consommés, heures supplémentaires pour tout le monde, dégradation du bien-être au travail, compétition acharnée... Bucket list of the dead présente un portrait acéré (et poussé à l’extrême ?) d'un stakhanovisme érigé en norme.
Mourir peut attendre
L’emploi d’Akira avait fait de lui un zombie. L’arrivée des morts vivants lui a permis de er du statut de salarié aliéné/zombifié à celui d’individu libéré, délivré, qui reprend sa vie en main. Une invasion zombie comme bonne nouvelle ? C'est un bon point pour la série, qui devra gagner en dynamisme pour ne pas perdre en intérêt par la suite.