Après la lecture des dernières pages, et de la conclusion brutalement tragique, il m’a fallu quelques temps pour reprendre mes esprits. J’avoue que je me suis appuyé sur la présence de Little Monkey, petite peluche douche et éponge de chagrins, pour me sortir de la léthargie.
Ce qui précède est une histoire vraie.
Colombe et la horde se termine donc avec l’effet d’une bombe, explosant tout sur son age, ne laissant une petite chance de répit qu’à deux personnages, les plus jeunes, espoirs fragilement incarnés d’un monde peut-être meilleur dans le futur. Une conclusion brutale et violente, comme une claque dans la figure. Mais était-elle méritée ?
Certaines histoires se terminent dans le drame et la tristesse à la recherche d’une respectabilité, parce qu’il vaut mieux pleurer que rire, dans un certain microcosme culturel qui n’aime pas les fins heureuses, trop vulgaires. Soyons plombants, un critique renommé en dira peut-être du bien après avoir eu la larme attrapé.
Mon propos peut sembler caricatural, mais la caricature est justement un des outils de Simon Hureau pour son récit. Entre la blanche et ingénue Colombe (vous aurez noté la subtilité de son prénom, qu’on veut aimer, et « la horde », qu’on ne peut que détester, les curseurs sont poussés au maximum, à l’image d’autres personnages tels que ce queutard qui profitera de la naïveté de la jeune fille, dont la repentance ne sera pas récompensée. Colombe est un petit bout de femme à l’innocence tellement pure, qu’elle se dessine comme le personnage à l’attachement travaillé afin ensuite de mieux faire souffrir le lecteur. « La horde », ramassis d’une famille de consanguins dégénérés et violents semble extraite de la pire des histoires du « Nouveau détective », là encore en grossissant le trait avec rage. Il n’y a rien à sauver chez eux.
Simon Hureau se serait inspiré d’un fait divers lu dans un journal abandonné, pour composer cette histoire. La fiction injectée dans « Colombe et la horde » ne rend pas justice à ces histoires crapuleuses, bien plus nuancées qu’ici, où les gentils sont punis, les méchants rescapés, par on ne sait quel miracle. Malgré certaines possibilités de rescousse, toujours empêchés, comme si l’issue ne pouvait être que tragique, et que chez ces gens là, monsieur, ce petit peuple à la marge, rien ne pouvait être contre eux. C’est dans leur éducation. Peut-être même dans leurs gènes. Un certain discours qui a déjà entendu dans une direction plus à droite qu’à gauche et qui semble ici rejaillir des pages souillées.
Les précédents livres lus de Simon Hureau, bien que plus récents, tels que l’excellent Hautes œuvres - Petit traité d'humanisme à la française ne témoignaient pas d’un grand attachement au comportement humain, conscients qu’il était capable du pire, et ne s’en privait pas. Un cynisme désabusé qui peut être rattaché à cette œuvre de jeunesse, malheureusement caricaturale. Tout le déroulé du livre apparaît comme une œuvre sans intérêt, comme une comédie de mœurs inoffensive avec ses questionnements humains avant de se teinter de noir, mais dont la chute tragique et exagérée apparaît alors comme grotesque. Le trait réaliste tout en étant légèrement exagéré a bien du mal à faire comprendre la noirceur qui se déploie, la faute à ces personnages trop gros pour être pris au sérieux, jusqu’à ce final précipité.