Avec L'Été Diabolik, Thierry Smolderen et Alexandre Clérisse livrent une bande dessinée aussi captivante qu’un polar rétro, où les secrets, les illusions, et une bonne dose de paranoïa s’entrelacent dans un décor de vacances. C’est une plongée dans les sixties, entre soleil éclatant et ombres menaçantes, où chaque page vous rappelle que même les étés les plus idylliques peuvent cacher des abîmes.
L’histoire nous est racontée par Antoine, un homme hanté par un été de son adolescence. En 1967, tout semblait parfait : le soleil brillait, la mer scintillait, et l’insouciance régnait. Mais, rapidement, cette carte postale idyllique se fissure. Des événements étranges, des regards énigmatiques, et un mystérieux espion russe viennent troubler le tableau. Antoine découvre alors que son monde est bien plus compliqué – et dangereux – qu’il n’y paraît.
Le personnage d’Antoine est immédiatement attachant. À la fois naïf et curieux, il incarne l’adolescence dans tout ce qu’elle a de plus vulnérable et téméraire. Les autres personnages, notamment sa figure paternelle énigmatique et les ombres qui gravitent autour, apportent des couches supplémentaires de mystère et de tension. Chaque interaction semble cacher un double sens, chaque sourire dissimule une vérité inavouable.
Visuellement, Alexandre Clérisse crée une œuvre d’art pop. Son style éclatant, mêlant formes géométriques audacieuses et couleurs saturées, capture parfaitement l’esthétique des années 60 tout en instaurant une ambiance de polar psychédélique. Les compositions des pages, dynamiques et surprenantes, renforcent l’immersion dans cette époque tout en accentuant la tension narrative. C’est comme si Saul Bass s’était invité dans un roman d’espionnage !
Narrativement, Thierry Smolderen tisse un récit complexe et intelligent. Les thèmes de l’identité, du mensonge, et de la mémoire sont explorés avec une finesse remarquable. L’intrigue avance par couches successives, chaque révélation ajoutant une nouvelle dimension à l’histoire. Cependant, ce choix de narration peut aussi perdre les lecteurs moins attentifs, tant le récit joue sur les non-dits et les sous-entendus.
L’atmosphère générale oscille entre l’insouciance estivale et une inquiétante sensation de menace imminente. Cet équilibre délicat est maintenu tout au long du récit, jusqu’à une conclusion qui laisse un goût doux-amer. Cependant, certains pourraient trouver que l’aspect onirique du récit, bien qu’élégant, atténue un peu l’impact émotionnel des personnages.
En résumé, L'Été Diabolik est une œuvre ambitieuse et envoûtante, où l’esthétique pop rencontre une intrigue captivante et subtilement paranoïaque. Avec des visuels à couper le souffle, une narration qui joue habilement sur les faux-semblants, et une plongée fascinante dans les années 60, Smolderen et Clérisse nous rappellent que les étés ne sont jamais aussi simples qu’ils n’y paraissent. Un polar psychédélique qui brûle comme un soleil d’août… et pique comme une ombre mal placée.