On retrouve Verloc Nim et Frederik Peeters avec plaisir.
Toujours aux côtés de son frère, Verloc et quelques personnages mènent plus en avant l’exploration de cette planète déserte où un groupe de scientifiques est resté isolé plus de cinq ans, et où l’on parle beaucoup d’une mystérieuse expérience : « L’expérience lancée par Woodland a des conséquences que je ne suis pas sûr de maîtriser », confie le frère de Verloc. Toujours un mystère, l’expérience prend de l’importance dans le récit en revêtant la possible forme du danger. Perchés sur d’impressionnants ambulateurs, les personnages parcourent les paysages arides jusqu’à l’apparition de formes de vie primitives inattendues.
Encore une fois je repense à Moebius, mais il y a aussi dans le voyage, et dans le personnage de Verloc, d’insondables correspondances au Blueberry de Jean Giraud. Cette quête de soi du héros qui ne se trouve jamais qu’à travers son interaction à l’autre, et qui pourtant cherche la protection morne de la solitude. Puis la forme évidemment, les grands espaces, les chevauchées vers l’inconnu avec un ordre de mission qui laisse planer plus de mystère qu’il ne donne d’informations. Verloc, avec le lecteur, se laisse entraîner dans quelque chose qui l’intègre et le dée en même temps. Bientôt, il prend la forme vague de l’élu, une perspective d’héroïsme insoupçonné dans les tomes à venir, face à la menace naissante. L’expérience prend forme.
La multitude invisible, c’est la nature : luxuriante jusqu’à l’infiniment petit. Ici, l’expérience rend cette multitude invisible extrêmement dangereuse : de partout plane alors une menace de tous les instants. Frederik Peeters imagine une hybridation de vie intelligente déclenchée par les scientifiques : de minuscules et innombrables robots mutent leur environnement naturel à une vitesse exponentielle, créant la vie en accéléré, s’intégrant aux plantes et aux insectes.
Et Peeters nous lâche avec art : la dernière page nous les montrent en action : ils vont jusqu’à expérimenter sur les rares humains qu’ils trouvent, se découpant un masque facial dans le visage d’un scientifique démembré.
Final macabre et climax accrocheur, vivement la suite !
Matthieu Marsan-Bacheré