« Ca valait le kilométrage, non ? »
Sixième album de Yoko Tsuno, voici la troisième aventure auprès des Vinéens. Mais cette fois, finies les intrigues souterraines dans les entrailles de la Terre : Yoko, Pol et Vic s’embarquent dans l’espace et mettent le cap sur Vinéa (enfin !), comme Khâny veut découvrir le sort de cette planète abandonnée depuis deux millions d’années. Les Trois Soleils de Vinéa marque l’entrée (réussie !) de Yoko Tsuno dans la véritable S-F façon space-opera.
Roger Leloup est un bonhomme étonnant : chacun de ses albums est meilleur que le précédent, et il injecte des bonnes idées avec une régularité déconcertante ! Ici ce sont les graphismes qui sont grandement améliorés : Yoko change de coiffure (et évacue du même coup les problèmes de perspective dans ses cheveux), tandis que tous les personnages sont mieux dessinés, avec des visages davantage travaillés, et des expressions plus abouties.
Côté décors, on est chez Roger Leloup : c’est somptueux. Non seulement la technologie vinéenne, déjà abordée dans d’autres albums, mais aussi les séquences spatiales, ou encore la découverte de la planète Vinéa. Mention spéciale à la tour et son amplificateur cérébral, deux panoramas particulièrement réussis !
Le scénario est bon, classique mais solide. On rappellera que Les Trois Soleils de Vinéa est sorti avant Star Wars IV, ainsi qu’avant Nausicaä de la Vallée du Vent, donc Roger Leloup était particulièrement novateur avec sa planète désertique à plusieurs soleils, et sa ville bâtie pour exploiter au mieux l’énergie du vent...
Egalement, cet album permet de fouiller davantage le personnage de Khâny, et lui donner plus de profondeur en ajoutant quelques fêlures (l’intrigue familiale). Bien vu, Khâny était jusqu’alors un peu trop lisse et parfaite.
Mais ce qui reste stupéfiant chez Roger Leloup, ce sont les connaissances techniques et scientifiques qui soutiennent toute l’intrigue. Certains faits exploités dans l’album sont rigoureusement exacts, comme par exemple les anneaux de Saturne composés de glace pure. D’autres éléments, même s’ils semblent délirants, n’en sont pas moins crédibles et séduisants pour l’esprit : l’idée de voyager au travers de trous noirs artificiels est particulièrement grisante !
Enfin, Roger Leloup a été découvert et lancé par Hergé, aussi rend-il ici hommage à son maître : comme la fusée du Professeur Tournesol dans On a marché sur la Lune, le vaisseau vinéen fait une manœuvre de retournement avant d’atteindre Saturne. C’est grâce à ce genre de clin d’œil que les aventures de Yoko Tsuno prennent toute leur saveur !