Chaque début d'année apporte son lot de belles découvertes et de petites surprises. Au mois de janvier l’année dernière, j’avais été marqué par La Vie rêvée de Miss Fran ainsi que Les Chambres rouges, deux films dont je n’attendais pas grand-chose qui s’étaient révélés de petites pépites. En ce début 2025, c’est 5 Septembre, long métrage signé Tim Fehlbaum, qui m’a fichu une belle claque.
Changement de style pour ce troisième long métrage du réalisateur, après deux films de science-fiction, Hell en 2012 et La Colonie en 2021.
5 Septembre est tiré d’une histoire vraie, celle de la prise d’otage des athlètes israéliens lors des Jeux Olympiques de Munich, à l’été 72. Comme pour le Munich de Spielberg me direz vous. Oui, mais avec un angle d’approche radicalement différent : Steven Spielberg s’attachait à dépeindre les négociations entre terroristes et autorités, et se concentrait sur l’après-prise d’otages. 5 Septembre choisit au contraire de suivre l’équipe de TV américaine ABC, chargée d’assurer la diffusion en direct des épreuves pour les USA. Sans être un huis-clos à proprement parlé, le film ne quitte jamais les journalistes, qui découvrent au fur et à mesure, toujours avec un petit temps de retard, les événements qui sont en train de se er à l'extérieur, dans le village olympique.
Les JO de 1972 sont les tous premiers Jeux à être retransmis en direct à la télévision, et sont suivis par 900 millions de personnes à travers le monde. Par le biais de cet événement hors normes, le film pose ainsi toute une série de questions éthiques sur le journalisme de façon générale : jusqu’où peut-on aller pour obtenir un scoop, ne met-on pas en péril la vie des otages à travers les informations qu’on révèle ?... Des questions qui résonnent de manière toute particulière en cette période de commémoration des attentats de Paris et du scandale des infos révélées en direct par BFMTV en pleine prise d’otage de l’Hyper Cacher.
La mise en scène de Tim Fehlbaum est particulièrement soignée. Bien qu’extrêmement documenté, le film va à l’essentiel, à travers un thriller journalistique resserré (le film ne dure qu’1h35) et haletant. En ce sens, 5 Septembre me fait penser à Spotlight – un autre Spielberg – pour son côté thriller d’investigation journalistique ; ainsi qu’à The Guilty, le film danois de Gustav Möller qui avait fait sensation en 2018, pour sa maîtrise du suspense dans ce que j’appellerai un « thriller de bureau ».
Sans grosse pointure pour tête d’affiche, le casting reste extrêmement convaincant : John Magaro et Peter Sarsgaard endossent le costume de journalistes TV, tandis que l’allemande Leonie Benesch (vous savez, l’actrice principale de La Salle des profs, sorti en 2024) incarne une traductrice poussée par les événements à prendre des initiatives.
Proposé au cinéma comme challenger au Maria de Pablo Larrain, l’autre film d’auteur de la semaine sur Maria Callas, 5 Septembre est un outsider sérieux, qui a connu un petit succès dans les festivals internationaux. Après sa présentation à la Mostra de Venise, le film était nommé aux Golden Globes dans la catégorie Meilleur film dramatique, et concourt actuellement pour l’Oscar du meilleur scénario original. Face aux mastodontes The Brutalist, The Substance ou Anora, le film a peu de chances de décrocher la précieuse statuette, mais peut déjà compter sur un beau succès d’estime !
5 Septembre est un excellent film, captivant et fascinant, qui traite finalement autant des JO de 72 et des attentats de Munich que des questions journalistiques liées à l’apparition du direct. Une très belle réussite qui lance formidablement bien l’année !