Anora de Sean Baker s’impose comme un film d’une puissance rare, alliant réalisme brut, humour subtil et satire sociale poignante. Le réalisateur explore le milieu des travailleuses du sexe contemporain en capturant une réalité dure et froide.
Anora ne se contente pas de montrer les vies de ces femmes ; il s’attarde sur leur rapport complexe aux élites économiques qui, en dépit de moments de proximité et d’apparente intimité, peuvent les écarter sans hésitation dès qu’elles ne servent plus leurs intérêts. Cette confrontation rend le film terriblement humain, brutal et touchant, révélant les rêves et désillusions d’une jeune femme aspirant à s’émanciper d’un milieu qui la limite.
La deuxième partie du film, axée sur la quête pour retrouver Vanya semble au premier abord lente, voire répétitive. Pourtant, ce choix narratif révèle toute l’habileté de Baker. Ce age en longueur impose au spectateur le retour progressif à une réalité où les illusions se dissipent. Le spectateur s’immerge dans cette quête, ressentant lui-même ce mélange de lassitude et de vérité qui rend “Anora” profondément crédible.
La dynamique entre Nora et son garde du corps russe, qui finit par comprendre et même protéger la jeune femme, ajoute une dimension émotionnelle et philosophique au récit. Leur relation évolue au fil du film, ant de la violence à une forme de complicité inattendue. Ce lien rend visible la morale de l’œuvre : malgré ses rêves, Nora réalise que le monde est bien plus cruel qu’elle n’aurait pu le croire, et que l’émancipation est souvent une illusion fragile.
Anora est un film brillant, touchant et implacable, qui nous rappelle avec force la dureté d’un monde où les plus puissants dictent les règles et restent impunis de leurs excès. Anora est une œuvre qui marque, non seulement par son réalisme, mais par la sincérité avec laquelle elle aborde des thèmes rarement explorés avec autant de profondeur. Un film dur, drôle, burlesque, social, qui donne matière à réfléchir.
Dernière scène magistrale, le bruit du moteur du vieux break résonne encore quand les images se dissipent.