Ceci n'est pas une critique
"Abigaïl prit l'habitude de venir chaque jour s'assoir sur mon lit au fond de la piscine pour prendre une collation, biscotte ou petit-beurre, et la nuit, je sentais rouler sous ma peau les miettes échappées de ses dents enfantines, qui aiguillonnaient mes désirs criminels embrassant mes insomnies en des érections congestives. Je lui montrais comment je dessinais les aiguilles à coudre d'un trait, et moins le chas en était perceptible, plus elle éclatait d'un rire inaudible et nerveux et m'applaudissait se jetant en arrière sur ma couche.
Une nuit elle vint glisser contre moi sa chair de poulette hérissée au froid polaire du grand hall, et c'est ainsi sur un lit de camp au fond d'une piscine vide où tombaient des étoiles diffuses, que les seuls mots d'amour qu'il m'arriva jamais de prononcer dans ma vie le furent à l'oreille de cette petite sourde-muette. J'y mêlais dans ma frénésie des obscénités effroyables qui sortaient comme d'un ventriloque de mes mâchoires crispées tandis qu'en des excitations asphyxiques et des tentatives orgasmiques instinctuelles s'exaspérait sous moi et hurlait en silence la petite Abigaïl ! Je ne pus achever. Par crainte de l'expulsion que je crus imminente d'une flatuosité qui me vint torturer les entrailles à cet instant précis où j'allais rendre l'âme, et dont je redoutais la pestilence, ravalant mon orgasme en pleurant, je m'arrachai à ma saillie. Et ces quelques grammes de millilitres de semence me remontèrent au cerveau, y provoquant une lésion maligne dont je ressens toujours les séquelles en des flashbacks éblouissants. Longtemps en vain ai-je essayé, par des masturbations expéditives, de crever cet abcès qui embrasait mon crâne, mais jamais le lait tiède et caille qui en sortit ne fut celui brûlant de ce soir exemplaire."