Extraordinaire touche-à-tout, Robert Wise s'est lancé pour la première fois dans le western avec Blood on the Moon en 1948, où il met en scène un cow-boy qui va peu à peu être tiraillé entre plusieurs dilemmes et découvrir qui sont vraiment ses amis.
Ambitieux, il tente ici d'inclure une dimension de film noir, alors en vogue à Hollywood, à celui du western, tant dans l'histoire en elle-même que l'ambiance ou encore le style. Il braque sa caméra sur ce cow-boy plutôt solitaire qui va devoir peu à peu faire les choix importants et, avec lucidité, comprendre dans quel camp il est. Autour de lui, il donne une vraie importance aux deux rôles féminins, finalement ce seront elles qui vont surtout faire avancer le récit et permettre d'inclure une dimension dramatique.
Pourtant, c'est aussi là l'une des faiblesses du film, à savoir une histoire plutôt intéressante mais dont les rebondissements, et surtout la finalité, sont mal écrits, surtout que Wise ne les sublime pas vraiment pour en faire ressortir l'émotion. La romance, ainsi que la dernière partie, laissent clairement sur la faim, ce qui est vraiment dommage car pendant une bonne heure, Wise se montrait impérial derrière la caméra, que ce soit dans l'exploration, la solitude et les maux de son protagoniste, ou la construction de l'intrigue. Il montre, à nouveau, qu'il sait prendre son temps pour bien développer une histoire et des personnages et en sachant les rendre intéressants à plus d'un titre, dès la bonne introduction il nous immerge au cœur du récit.
La noirceur de l'oeuvre se fait surtout ressentir dans le style et le cadre du récit, Wise nous plongeant souvent dans la nuit, avec un temps hivernal, froid et pluvieux. L'ambiance est d'ailleurs à cette image, c'est-à-dire sombre, ténébreuse voire même désenchantée. Comme il l'a si souvent montré dans sa carrière, Wise joue brillamment sur le contraste du noir et blanc, accentuant les émotions des personnages, ainsi que la dureté de la situation. Malgré ses quelques maladresses, l'oeuvre reste tout de même intéressante de bout en bout, et elle le doit aussi à un Robert Mitchum impérial, apportant une profondeur à son personnage solitaire, lucide et finalement attachant.
Si Blood on the Moon se révèle souvent maladroit, il n'en reste pas moins intéressant à plus d'un titre, notamment grâce à ce mélange des genres plutôt bien orchestré par Robert Wise malgré une fin décevante, ainsi qu'un Robert Mitchum, comme souvent, impérial et sachant apporter profondeur et complexité à son personnage.