A la suite du succès commercial du premier film de Kurosawa, les studios lui demandent de réaliser une suite. C'est chose faite avec la Nouvelle Légende du grand judo, aussi tourné pendant la guerre (alors que le pays était rasé par les bombardements américains, soit) et donc sous la coupe de la propagande militariste. (Petite parenthèse : il y a beaucoup d'acteurs blancs dans le film qui jouent le rôle d'Américains, surprenant vu le contexte… A priori ce serait des acteurs turcs ou russes, quelques familles ayant fui au Japon dans les années 1920 et 1930).
Il va sans dire que Kurosawa a mis peu d'entrain dans ce film, pas méga bon il faut bien le dire. Il n'y a qu'à voir le scénario : après avoir voyagé et gagné en sagesse, notre héros Sanshiro Sugata refuse de faire un match d'exhibition contre un boxeur américain puisque la violence n'est pas un spectacle, et refuse de se venger contre les frères chelous de son antagoniste du premier volet. Yes, ça c'est l'esprit du judo! Ah bah non, finalement fuck it, il défonce le boxeur américain (faut bien fantasmer en 1945) puis les frères tarés dans les règles de l'art. Pourquoi pas, après tout. Le but est bien de démontrer la supériorité du judo sur d'autres disciplines, la boxe et le karaté, après avoir taillé en pièces le ju-jitsu dans le premier volet.
Mais c'est quand même légèrement mieux que le premier volet. Déjà l'histoire a plus de sens, vu que le film ne s'est pas fait violer par la censure. Surtout, Kurosawa montre déjà sa malice et son talent. La première scène est en miroir du premier volet, avec un gars envoyé net dans l'eau. Il y a des relents d'expressionnisme fort, notamment quand Sanshiro monte les escaliers en refusant de voir le combat de boxe derrière lui, il y avait du Nosferatu dans l'air. Enfin le film respire la bienveillance : à la fin du film, Sanshiro décide de soigner les frères qui finissent par s'adoucir, et lors du dernier plan son visage rayonne comme s'il avait enfin gagné, cette fois pour de bon. Une ode pacifiste en pleine guerre mondiale ?