Simple. Sincère. Touchant. Magnifique.
Le titre, l'humilité de sa faute de français inhérente au Sud-Ouest, les vertes herbes abandonnées (et non pas encore àmandonné) et les premières paroles nous placent dans un univers aussi affectueusement familial que tristement poétique. Il y a le père, un ancien rugbyman, encore enfermé dans la mémoire de ses heures de gloire et le souvenir de sa femme. Il y a le fils, la nouvelle génération, le petit intellectuel, qui travaille bien à l'école, veut avoir un portable parce que c'est sa génération, le petit qui se rebelle loin d'une famille qui ne lui ressemble pas. Et puis il y a Pompom, un Vincent Moscato irrésistible de tendresse, de sourire, d'attachement à ces simples d'esprits qui n'ont jamais connu leurs vieux et cherchent encore leurs racines au milieu des petites gares du Périgord aux jours d'hiver.
Le fils à Jo, c'est un monde où le rugby résiste encore et toujours à l'envahisseur économique, jusqu'à faire changer l'avis du père sur les décisions antérieures, par amour. C'est un monde où on a aucun autre moyen de découvrir une toute petite ville que celui du rugby. C'est un monde où on affiche toujours les résultats des équipes et des visiteurs sur des panneaux en bois. C'est un monde où il n'y a pas de bruit, pas de pub, pas de buvette, pas de compétition, simplement des rêves, du courage qui vient en osant, et des sourires.
C'est un film français, bien sûr. Même s'il réunit toute la planète rugby (Moscato et plein de petits rôles qui ent par là, de Guy Novès en sabreur de champagne à Califano en chef de gare), les dialogues sont très scriptés, parfois hésitants, parfois pas assez mis à l'épreuve du plateau. Les ficelles dramatiques sont cousues de fil blanc, mais elles fonctionnent efficacement : chaque élément qui paraît gratuit finit par revenir et par tout relier, doucement, même si c'est prévisible et qu'on se dit avec une tendre ironie " Oh ben ça alors ! ". Une jolie et efficace leçon de construction dramatique, qui offre des petits moments de respiration, vraiment gratuits ces fois-là, lesquels viennent renforcer la grande tendresse qui se dégage de cette ode à l'Ovalie. Les décors naturels sont beaux, l'hiver est beau, on ressentirait presque le froid et la brume rien qu'en voyant ces scènes matinales. Simple, peu formaliste, Le Fils à Jo n'a pas d'autre intention que de toucher, et essentiellement quand on vient du pays de ces petites gares à une seule voie où la voix de Simone Hérault n'existe toujours pas, quand on a un père fervent spectateur de rugby et des populaires troisièmes mi-temps sous les poteaux du stade Aramandie, quand son père voudrait parfois qu'on fasse autre chose de sa vie, quelque chose de moins intellectuel peut-être, de plus familial, de plus simple surtout.
Un film si touchant qu'il en est parfois triste et qui peut faire pleurer plus que n'importe quel chef-d'œuvre. Un film où on sourit en pensant à un Pompom tout simple, incapable finalement de prendre le train qu'il veut prendre. Mais on se sent heureux, en se disant qu'àmandonné, à force de persévérance, de rêve, d'espoir, il le prendra son train, Pompon, ammandonné.
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