Introduction :
Les Imposteurs est un film assez peu connu de 1988 (qui a l’air de sortir de 1978) et dont le titre peut détonner un peu. Là-dedans, Le lieutenant anglais William Savage (Pierce Brosnan) travaille pour la Compagnie des Indes britanniques en 1825, il est du genre intègre voire super actif, altruiste et veut aider tout le monde dans son district quitte à froisser sa hiérarchie représentée par son beau-père le colonel Wilson.
Mais il peut compter sur le rajah de son district et colonial sur son épouse Sarah pour le soutenir dans sa quête de justice et de "mission civilisatrice" (il veut construire des écoles et développer les infrastructures tandis que la Compagnie veut juste « ne rien faire et ne rien laisser faire »). C’est sûr, on s’attend à ne voir que le point de vue du « bon colonisateur » en voyant ce film avec un Gary Stu comme héros aux premiers abords.
Un jour, Savage voit qu’une femme est prête à se suicider par immolation rituelle car elle croit que son mari Gopal le tisserand, porté disparu, est mort. Savage lui promet donc de le ramener vivant si elle renonce à se laisser brûler. Mais comme ça ne marche pas, il se fait alors er pour son mari Gopal (qui a la même stature) et s’aperçoit que la disparition de ce dernier serait en rapport avec les meurtres rituels perpétrés par les Thugs, une secte de dangereux étrangleurs fanatiques vénérant la déesse Kali.
Une fois l'intro du film é, c'est là que le métrage se montre un peu faible par moments cependant.
Négatif : De Pierce Brosnan à Pierce BrosNAAN - la Thug Life de Savage
Savage obtient d’ailleurs l’aide d’un thug repenti en plein doute pour l’aider dans sa quête : Hussein. Et c’est aussi là que le film se veut plus nuancé envers sa figure de "bon colonisateur" car le personnage adopte des comportements ambigus nous laissant dans la confusion. Parce que dans l’exécution, on ne sait pas si Savage se fait avoir par les circonstances … ou s’il est juste très mauvais en fait.
C’est là qu’on se dit qu’avant d’être James Bond, Pierce Brosnan jouait le plus mauvais agent infiltré du monde ! Sans être du niveau de Max la Menace ou de Austin Powers, il essaye tellement de ne pas griller sa couverture qu’il fait tout sauf respecter ses promesses et principes. Du coup, on sait pas si le film est dans la nuance ou si Savage est en mode "je n’ai choisi la vie de thug, la vie de thug m’a choisie !"
À part que thug veut dire "imposteur" dans le sens dissimulé voire ninja hindou dans le film, Mais le titre garde son sens : les étrangleurs ne sont pas les seuls imposteurs ici. Surtout vus les agissements de Savage dignes d’un bon facepalm par moments. Déjà que quand sa femme Sarah l’a surpris entrain de se maquiller de marron pour imiter un hindou, on aurait cru qu’elle le jugeait comme s’il faisait une black face en mode "frérot arrête, c’est cringe" XD
Et en plus, il tue le Gopal qu’il devait imiter et ramener à la maison pour sauver sa femme du suicide. Car il s’avérait qu’il était en fait un thug emprisonné chez un maharajah, d’où son absence. Sauf que Savage l’étrangle comme un fanatique et justifie ça au prétexte qu’il allait griller sa couverture -₋-. Pas étonnant que la femme de Gopal s’immole à la fin, non mais qu’il est bête …
Pour pas arranger le coup, Savage étrangle même d’autres gens ou menace de la faire alors qu’il avait promis d’éviter ça. Ne pas vouloir éveiller les soupçons est une chose, mais là il a l’air déé trop vite par les événements :
Il aide un thug à étrangler un rajah, il prend de la drogue dure et addictive donnée par un prêtre de Kali (alors que Hussein lui avait montré comment éviter ça discrètement), et il manque limite de tuer un gosse et une prostituée.
Hussein lui avait pourtant bien prévenu de ne pas trop chercher à imiter les fanatiques de Kali, au risque de lui appartenir corps et âme. C'est là que Les Imposteurs devient moins ridicule et remplit mieux ses promesses.
Positif : Faux semblants, la Malédiction de Kali
Après, pour autant le film reste suffisamment nuancé vu que le héros, même bien intentionné, avait un complexe de supériorité, croyait son Dieu chrétien supérieur à la Kali hindoue, se pensait Anglais infaillible et tout puissant. Il tombe bien des nues en se mettant à faire le sale boulot pour les thugs et Kali, à se montrer infidèle envers sa femme, à voir des membres de la Compagnie être corrompus ou racketteurs, et à douter de son identité coincée entre colonisateur anglais et thug hindou.
Les thugs, bien qu’étranglant leurs victimes pour des besoins rituels, par extase sadique et par appât du gain, agissent aussi ainsi pour payer les droits de douanes entre districts anglais et hindous (voir la scène où l’Anglais corrompu les rackette). Ils doivent même traverser parfois des principautés locales où les voleurs sont écrasés par des éléphants, craindre des purges internes et éviter les bandits locaux en se mettant sous la protection de princes qui se promènent avec leurs escortes (pour mieux les voler et tuer ensuite cependant).
Et bien que sa Compagnie peut se montrer indifférente envers les Indiens, ou que ses rajahs locaux semblent impuissants ou superstitieux, ce sont finalement les deux qui viennent en aide à Savage alors qu’il était encerclé par les fanatiques de Kali. C’est enfin là que le film e d’une nuance confuse à une nuance bien cynique ou ironique rendant le film moins ridicule que prévu en se rattrapant avec ses fins :
La femme de Gopal se suicide quand même à la fin sans savoir que Savage est responsable de sa mort. Savage, bien que menacé dans sa position au début du film pour ne pas avoir respecté toutes les procédures de la Compagnie pendant son enquête, finit par prendre du galon pour avoir dénoncé les pratiques des étrangleurs thugs. Mais il a toutefois perdu la foi en son Dieu, il jette donc son crucifix à la fin, tourmenté par ses actions pour Kali et se rendant compte qu’il a été ou est lui-même un imposteur dans tous les sens du terme.
Conclusion :
Dans un sens, tout le film n’est que faux semblants : alors qu’on s’attendait à un film d’aventures où un Blanc bon colonisateur au sein d’une compagnie méprisante serait un héros incontesté, il s’avère qu’il est en fait un piètre agent infiltré en se fondant beaucoup trop parmi une secte d’étrangleurs imposteurs. Se croyant pur, il se rend compte qu’il a lui-même des penchants sadiques et qu’il est trop maladroit pour tenir ses promesses faites aux autres et à lui-même.
Après un début et un milieu avec des éléments parfois ridicules, le long-métrage se rattrape vers la fin dans son exécution pour mieux faire marcher le côté nuancé avec son héros qui se révèle imparfait en s’étant menti aux autres et surtout à lui-même. C’est sûr le mot thug reprend son vrai sens loin des voyous dans les films américains, et pas limité qu’à la figure de l’étrangleur fanatique de Kali, déesse de la destruction mais aussi de la transformation.