Môssieur Ducon, s'il te plaît.
Prenez une situation banale: un connard vous emmerde, une pétasse vous fait chier, un trou-du-cul vous prend pour une conne, une ordure vous crache à la gueule et en jouit... Que faites-vous ? Comme tout le monde : rien. Vous vous écrasez, parce qu'on vous a appris qu'être civilisé, cela veut dire ne pas recourir à la violence, ne pas s'énerver, ne pas être plus con que la moyenne, ne pas entrer dans le jeu de l'adversaire, ne pas être comme lui, ne pas faire à autrui ce que... Bref, vous connaissez la rengaine chrétienne : tends l'autre joue, va gémir en silence, paie tes impôts et contente-toi de tes congés payés.
Ouais. Bof. Peut-être. Bien sûr, c'est ainsi que réagissent la majorité des humains, puisque c'est précisément ce qu'ils sont : humains.
Parfois, tout de même, sans qu'on sache bien pourquoi, quelqu'un décide de ne pas s'écraser. De réagir. De se rebiffer. S'il s'agit d'une simple vengeance, ça donne un film d'action débile, avec un héros crétin, des explosions sans raison, bref, une merde de plus destinée aux veaux pour en faire de futurs boeufs. La routine du cinoche à poop-corn. Nous, on s'en tape.
Avec Relatos salvages, on aborde un ton différent. Quelque chose de plus. Un petit détail subtil (qui m'a un peu rappelé "Et maintenant, on va où ?" de Nadine Labakhi, dans sa manière de dire "Eh oh, ça suffit, les clichés ! Arrêtez de dire que tout est toujours pareil et bougez-vous le popotin")... A savoir, qu'il serait peut-être temps que les gentils êtres "humains" cessent de se laisser marcher sur les arpions par ceux de leurs "semblables" qui en profitent justement parce qu'ils savent qu'ils n'ont rien à craindre. Et que, parfois, réfléchir un tout petit peu au lieu de réagir avec ses tripes, ça peut créer une nouvelle situation ; peut-être pas avec une solution géniale, mais en tout cas, quelque chose de neuf et de plus facile à er ; de moins regrettable ; moins chargé de remords.
Ce film, à travers quelques situations hélas banales (je veux dire que nous avons tous vécu quelque chose d'équivalent), montre des personnages qui réussissent à dévier leurs réflexes de bonne éducation (à part les deux automobilistes, qui vont jusqu'au bout de leur "ion" mutuelle, en guise de contre-exemple) pour les convertir en autre chose. Leurs solutions ne sont pas toujours formidables ou efficaces, mais elles nous changent du discours habituel ("Venge-toi ou ferme-la") ; rien que pour cela, c'est déjà un gage d'originalité et de plaisir. Mais il n'y a pas que cela : c'est bien filmé (sans ostentation), fort bien joué (la jeune mariée trompée est efffffrayante) et surtout, jubilatoirement imprévisible. De plus, Szifron a le chic pour filmer la banalité dans ce qu'elle a de plus inable (le "beau Danube bleu" pour la première danse du mariage : arrrrggggghhhh!).
En fait, je crois que ce film m'a donné l'envie de er à l'acte...
Allez, c'est dit : le prochain connard qui se fout de ma gueule (ou la prochaine connasse, y a pas de raison ; parité dans tous les domaines !), je lui réserve un chien de ma chienne, mais du genre tarabiscoté, qu'il ne verra pas venir, et qui lui mettra du plomb dans le crâne. Mais non, pas un gros calibre ; je veux dire : qui le rendra moins con.
Utopique ?
On verra. Je vous tiendrai au jus. Si je suis toujours vivant...
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