Le contexte délicat dans lequel sort Nocturama, relégué entre autre à la fin de l'été, ne doit pas ternir l'image d'un film de révolte tué dans l’œuf. Et même si le terrorisme de Nocturama fait écho aux attentats de Paris, celui-ci s'imprègne plus d'une jeunesse rebelle que d'un fanatisme religieux en guerre contre l'occident.
Le film s'ouvre donc sur un étrange ballet dans le métro : sur le qui-vive, sans émotion, les personnages se croisent sans un mot et s'éparpillent aux quatre coins de Paris. La danse se fait tout de même longue, surtout quand l'attente d'une revendication grandit pour lever le voile sur un ridicule mal digéré. Le lien entre ces jeunes est alors amené maladroitement, coupant la trajectoire disciplinée par les intentions revendicatrices des auteurs. On reste alors perplexe quand à cette envie de révolte, et pour ne pas choquer on balaye le plus largement possible un échantillon représentant la population. La faute non pas à une religion ou à la pauvreté mais bien à la jeunesse, qui bien qu'issue de milieux différents se retrouve sur l'issue à adopter pour éveiller... quoi d'ailleurs ? Intentionnel ou pas, le message des attentats reste en suspend quand la deuxième partie du film se lance dans l'attente. On découvre alors une jeunesse plus sensible que dans l'orchestration du début. C'est d'ailleurs vraiment dans cette attente dans un grand magasin que s'instaure un lien avec le spectateur. Le malaise se déploie et le côté réalisation bourgeoise du réalisateur attise notre intérêt. Au milieu du temple de la consommation, chacun retrouve un visage humain, celui des jeunes de cet âge, inconscient de la folie, qui sombre dans l'attente d'un Paris qu'ils perçoivent comme silencieux malgré leurs efforts.
La mise en scène, bien que guindée renvoie une distance, celle-ci se fait moins sentir dans le huit clos pourtant spacieux du magasin. Les explosions paraissent fades et sans dynamisme, et la réalité finale quelque peu entachée par une froideur qu'on espère dissonante. La fin vient d'ailleurs mettre un point d'orgue au malaise de l'attente, un questionnement sur l'attitude qui interroge forcément le spectateur sous l'état d'urgence mis en place. Si on est bien conscient de la distance de Bonello entre ses personnages et les terroristes qui ont semé la terreur sur notre territoire, peut-on accepter un tel déchaînement de violence de la part des autorités ?
Le film a ses longueurs et n'est clairement pas dans l’émotionnel, sorti le même jour que Divines, il est bien l'antithèse de celui-ci, mais ils arborent tout les deux la marque violente d'une jeunesse exaspérée.