Pulsions scopiques

Nous tenons là un film brillant, à la mise en scène précise et au scénario ionnant, habité par un Robin Williams en parfait contre-emploi. Mark Romanek insuffle à son épatant long métrage une identité visuelle en complète adéquation avec son propos. D'emblée le réalisateur nous plonge dans les tréfonds de la psychologie du pathétique Sy Parrish, modeste développeur photographique obsédé par le quotidien d'une famille américaine visiblement idyllique. C'est à la fois terrible, fascinant et cinématographiquement prégnant.


Comme toujours Robin Williams réussit à transcender le potentiel originel du film de Mark Romanek : la façon avec laquelle l'acteur parvient à défendre son personnage demeure proprement salutaire, incarnant un sociopathe introverti d'une émotion pour le moins inattendue. Si ce rôle de composition n'est pas sans rappeler celui qu'il campera dans le respectable Insomnia de Christopher Nolan il s'avère ici beaucoup plus poignant et nuancé, témoignage d'un acteur dont le capital sympathie nous manque encore aujourd'hui.


Par ailleurs Photo Obsession bénéficie d'une véritable couleur atmosphérique, croisement des dispositifs cliniques et scopiques du cinéma de Michael Haneke et de l'ampleur formelle de certains Kubrick ; ainsi la fluidité des mouvements de caméra renvoie directement à la réalisation hypnotique de Shining, film-démiurge contant lui aussi la folle obsession d'un protagoniste mettant à mal sa propre famille... Et si Sy reste une figure proche du quidam ou de l'anonyme servile débarrassé de tout contexte familial il n'en est pas moins désireux voire entièrement envieux. Romanek parvient à nous sortir de notre zone de confort en nous plaçant avec lucidité du côté de Sy Parrish, personnage résolument indissociable de son interprète de génie. A voir absolument !

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le 25 mars 2020

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stebbins

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