Original sur le fond, maîtrisé et tendu du début à la fin, parfaitement interprété et captivant sur les sujets qu’il entreprend, ce premier film de Mathieu Gerault est une excellente surprise. Surtout, fait rare, on peut sans peine avancer que « Sentinelle sud » ne souffre quasiment d’aucun des défauts inhérents aux premières œuvres comme c’est souvent le cas. Le scénario est bien écrit et nous cueille avec son histoire de soldats de retour en après une embuscade meurtrière louche en Afghanistan. Ceux-ci vont tenter à la fois de se reconstruire, de démêler le vrai du faux dans cette affaire tout en essayant de gagner de l’argent ainsi que rembourser une dette d’une manière pas très catholique. Un script qui se révèle touffu sans être trop chargé. A la fois prenant sur le versant du suspense militaire et émouvant sur celui de la psychologie de ces soldats quelque peu abandonnés à eux-mêmes, ce long-métrage épate et fonctionne sans écueil. Le sujet du retour de la guerre est tout de même moins âpre et difficile que dans le cinéma de l’Oncle Sam, car le problème du traitement des soldats de retour au pays en est moins flagrant et problématique que pour les soldats américains dont le syndrome post-traumatique a été le sujet de beaucoup de débats et a occasionné de nombreux films. De « Dans la vallée d’Elah » à « Cherry » pour les plus réussis mais moins connus au bulldozer à succès patriotique « America Sniper », les exemples courent les salles contrairement au cinéma français où c’est un sujet rarement abordé et c’est ici le cas avec beaucoup de justesse et de précision.
Les dialogues qui habillent « Sentinelle sud » sont le plus souvent parfaitement écrits et mis en bouche mais c’est lorsque le sujet de la guerre et du retour au bercail et ses conséquences est abordé qu’ils frappent le plus fort. Le constat des deux protagonistes est fin, logique et triste, presque évident mais il est nécessaire de l’entendre. Ces hommes qui ont donné leur vie pour la et seront changés à jamais souffre de cette déconsidération, de cette impression de n’être chez eux nulle part et de n’appartenir à rien, la guerre devenant leur seul leitmotiv. Si la réalisation de Gerault est purement illustrative, le film demeure sous tension. L’enquête sur le trafic d’opium et les magouilles des deux personnages principaux est prenante et nous fait vibrer pour ses personnages. Le très beau duo formé par Niels Schneider et Sofian Khammes, qu’on n’aurait tous deux pas imaginé là, campe de très bons soldats, crédibles et sincères. L’amourette de l’un d’entre eux avec une infirmière jouée par India Hair apparaît plus anecdotique et pas forcément nécessaire. Dans tous les cas, « Sentinelle sud » est un bon suspense doublé d’un drame plus insidieux et très intéressant par le sujet peu commun qu’il aborde. Une bonne surprise que ce premier film é inaperçu lors de sa sortie.
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