Ringard à souhait

Après un début de carrière dans le X, dont pas mal de pornos gays dans la première moitié des années 80, David DeCoteau a envie de changement et aimerait mettre en scène des films plus classiques. Il fait la rencontre du célèbre producteur Charles Band, spécialiste de la série B et du cinéma d’exploitation, qui lui confit la réalisation du film Creepozoids (1987). Joli succès dans les vidéoclubs, Charles Band est tellement de DeCoteau qu’il lui fait signer un contrat de 10 films via sa maison de production Empires Pictures, puis la Full Moon. Le premier de ces films s’intitule Sorority Babes in the Slimeball Bowl-O-Rama, un titre bien ringard qui est déjà tout un programme à lui tout seul. Ce programme va être simple : de la comédie, un peu d’horreur, des demoiselles qui n’ont pas peur de retirer leurs vêtements, et avec pour but de faire un maximum de pognon avec un minimum d’argent investi au départ (on parle d’un budget de 90000$US). Le résultat est sacrément ringard, sacrément mauvais également. Mais pourtant, il ressort de ce film un petit quelque chose qui le rend malgré tout attachant.


Quand on s’intéresse un peu à la conception du film, il est assez facile de comprendre le résultat. Déjà, le scénario a été écrit d’un seul jet en 12 jours, et le tournage n’a pas duré plus longtemps. En même temps, avec même pas 100000$Us de budget, on peut comprendre qu’il faille aller vite. Le budget du film était tellement faible qu’ils ne pouvaient pas louer le bowling, lieu principal de tournage, pendant les heures de pointe de la journée, les acteurs ont donc dû tourner à la fermeture du bowling, à partir de 21h, et ce jusqu’à 9h du matin, heure de réouverture du lieu. En attendant que le bowling ferme, il semblerait que tout le monde participait à des apéros un peu trop arrosés et point que David DeCoteau a déclaré des années plus tard que c’est le seul film qu’il a réalisé où il était continuellement ivre, comme la plupart des acteurs et des membres de l’équipe technique. Il faut dire qu’il y avait en plus un open bar sur le plateau et qu’ils l’ont utilisé à bon escient. Même avant cela, le film avait été vendu sur la seule base de l’affiche, avant même qu’un scénario soit écrit, c’est dire si tout cela a été fait à l’arrache, bien que ce procédé fût régulièrement utilisé à cette époque. Pas de pognon, beaucoup d’alcool, mais des gens qui avaient malgré tout envie de mettre en boite cette grosse pantalonnade où rien ne semble réellement sérieux. Rien que l’intrigue est complètement absurde, pas aidé en plus par un scénario mal écrit. Trois nerds un peu trop obsédés, qui se mettent à espionner les filles d’une confrérie, vont se faire prendre et, en guise de punition/gage, vont être forcés, en compagnie de deux demoiselles voulant rentrer dans la sororité, de voler un trophée dans un bowling. Sauf que, alors que personne n’était au courant, un diablotin qui accorde des souhaits qui se transforment en malédiction est enfermé dans ce trophée. Oui, le scénario a lui aussi dû être écrit sous l’emprise de l’alcool ou d’autres substances faisant rire. Si on devait voir un message dans Sorority Babes in the Slimeball Bowl-O-Rama (bordel mais quel titre !), c’est peut-être que parfois ces bizutages pour rentrer dans les sororités tournent mal, mais ça serait donner bien trop de crédit à un scénario qui n’a même pas ce minimum de profondeur.


Qui dit années 80 et Charles Band dit boobs, si possible gratuitement, surtout avec au casting Michelle Bauer, Brinke Stevens et Linnea Quigley, même si cette dernière ne va, pour une fois, pas montrer ses attributs mammaires. Et il y a même du nude full frontal touffe à l’air et une étrange fessée fétichiste de cinq minutes ! Il y a par contre très peu de gore malgré les différents meurtres et tout est quasiment hors champ faute de budget et de temps. Il y a malgré tout quelques moments plutôt rigolos comme une tête décapitée qui va servir de boule de bowling. De toutes façons, il y a beaucoup de pénombre au point qu’il est parfois un peu compliqué d’y voir quelque chose. Le jeu des acteurs est absolument horrible (dur de jouer en étant bourré) et il n’y a sincèrement que Linnea Quigley, très contente de ne pas avoir à montrer ses seins pour une fois, et son personnage au look punk rock qui sauve le casting des tréfonds obscurs avec ses répliques très funs. Malgré tout, l’ensemble reste léger et divertissant, pour peu que vous appréciiez un minimum ce genre de pantalonnade fauchée crétinoïde des années 80 mélangeant comédie, nudité et un poil d’horreur. Et puis il se dégage malgré tout une certaine innocence et naïveté au milieu des meurtres et des boobs, de cette époque où on faisait tout et surtout n’importe quoi avec trois bouts de ficelle. Et le diablotin dans tout ça ? Le diablotin… Toute une histoire. Imaginez votre petit neveu de 10 ans qui fabrique un diablotin en pâte à modeler bleu, vous lui faites vaguement bouger la bouche et les oreilles et hop, vous avez un diablotin tout moche. Quand on n’a pas de pognon, on fait comme on peut, et ils n’avaient vraiment pas de pognon. C’est assez catastrophique sur tous les points, mais pourtant le film se fait attachant sans qu’on sache réellement pourquoi. Il a même acquis un petit statut de film culte chez certains amateurs de bisseries et a même eu droit à une suite intitulée Sorority Babes in the Slimeball Bowl-O-Rama 2 sortie en 2022, réalisée par Brinke Stevens qui reprend son personnage du premier film aux côtés de Michelle Bauer.


Sorority Babes in the Slimeball Bowl-O-Rama est une comédie érotico-horrifico-fauchée qui ne plaira clairement qu’aux amateurs de bobines ringardes des années 80, d’autant plus si vous aimez les films bricolés avec trois bouts de ficelles.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-sorority-babes-in-the-slimeball-bowl-o-rama-de-david-decoteau-1988/

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le 13 mars 2025

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cherycok

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