Le chef d'oeuvre de John Woo
The Killer, est à mon sens le chef d'oeuvre de John Woo. Baroque, violent, mélodramatique, désespéré, un film porté par une ion extraordinaire et un véritable amour du septième art. En 1989 The Killer a révolutionné le cinéma d'action et le polar, balayant d'un revers de la manche tout les archétypes éculés des films d'alors.
Dés le début du film John Woo démontre un savoir faire rarement égalé. En moins de cinq minutes, John Woo présente les protagonistes principaux, les liens qui les unissent et leurs champs d'actions. Construit comme un remake du film « Le Samurai » de Jean Pierre Melville, John Woo, multiplie les citations. On pense à Jaques Demy, comme dans « Les demoiselles de Rochefort », les personnages se croisent, se connaissent par l'intermédiaire de personnages secondaires, mais ne se rencontreront qu'a la fin du film. Le trio amoureux évoque une histoire à la « Jules et Jim » sans l'aspect marivaudage du film de Truffaut. Suzuki Seijun pour "La marque du tueur" ou encore "La horde sauvage" de Sam Peckinpah et "La rage du tigre" de Chang Cheh.
La caméra de John Woo accompagne les acteurs dans leurs actions, semblent virevolter dans les combats. Les ralentis, (multipliant allègrement les clins d'oeil à Peckinpah et Chnag Cheh) exploité à bonne escient marque des flottements dans le temps, soulignant un regard fugace entre Chow Yun Fat et Sally Yeh, la trop forte ressemblance entre le Danny lee et le même Chow Yun Fat ou enfin l'héroïsme extraordinaire de ces deux hommes assaillit par les triades. Tout ces moments sont pour John Woo de véritable moment de grâce. Fidèle chrétien, John Woo multiplie les références biblique et filme ses acteurs comme des martyrs. La fidélité de Kenneth Tsang et Chu Kong est poignante. Les deux hommes se sacrifie pour leur meilleurs amis dans des scènes d'une violence crue, voire exagéré, mais d'une force qui émeut le plus insensible des spectateurs.
Le film est parcourut de morts violentes, les héros se posent des questions métaphysiques sur le monde qui les entourent et qu'ils ne reconnaissent plus. Comme dans « La horde sauvage », ils semblent les derniers représentants d'une époque révolue, s'interrogent sur l'amitié (thème cher à John Woo), la mort, l'honneur et la justice.
Le final, un gigantesque gunfight dans une église est à la démesure du film. Souvent comparé à un bal funèbre, les acteurs traversent l'écran par vagues successives pour mourir dans des ralentis sanglant. Au milieu de ce chaos, John Woo finit d'imposer sa vision de l'héroïsme. Chow Yun fat et Danny Lee tout de blanc vêtu se retrouvent progressivement maculé du sang de leurs ennemis, pendant que des colombes virevoltent, éteignant des cierges symbole de toutes ces vies qui s'éteignent. Une statue de la vierge volent en mille morceaux sur fond de Messie de Haendel, la fin de tout espoir, présageant d'une scène finale sans concession.
Bien sur, face à cette débauche de sentiments exacerbés, de scènes d'actions truffé de ralentis certains resteront de marbre et n'y verront qu'un polar mièvre et au style over too much.
Toujours est-il que pour moi ce film fût une révélation, c'est avec ce film que pour la première fois j'ai réellement compris le travail d'un réalisateur de bout en bout. Jamais un mouvement de caméra ne m'as semblé plus limpide, aucun des ralentis ne me semble gratuit.
Je suppose que pour apprécier le cinéma de John Woo à sa juste valeur, il faut être soit même un grand sensible, savoir s'émouvoir de son style baroque et se régaler de sa narration parfaite et de la qualité extraordinaire du montage effectué par John Woo et David Wu.The Killer est l'oeuvre d'un grand cinéaste en pleine possession de son art, novateur, exubérant et ioné.