Originalement programmé pour une sortie dans les salles, le film fut présenté dans de nombreux festivals, dont celui de Sitges en octobre 1991 ou celui d'Avoriaz en janvier 1992 hors compétition, avant de sortir directement en vidéo. Une étrange destinée qui confère à la surprise de prime abord, tant les adaptations sur grand écran des œuvres de H.P. Lovecraft sont rares, doublée d'une incompréhension non moins légitime compte tenu de la notoriété supposée de son réalisateur-scénariste.
Deuxième adaptation de la nouvelle L'affaire Charles Dexter Ward, après celle signée par un spécialiste du genre, Roger Corman, dans le classique La malédiction d'Arkham (1963) avec Vincent Price, The Resurrected s'éloigne en premier lieu de l'histoire originelle en la transposant à l'époque contemporaine, le jeune antiquaire devenant dans ce cas un chimiste d'âge mûr. D'un scénario titré Shatterbrain et écrit au départ par Brent V. Friedman, spécialiste du film de science-fiction fauché et navrant, celui-ci fut remanié par la suite par O'Bannon sous le nouveau titre The Ancestor, gommant au age les quelques craintes levées après la découverte du nom dudit scénariste original. Enfin, autre écart important, si dans la nouvelle de Lovecraft l'enquête était menée par le psychiatre Marinus Bicknell Willett, O'Bannon inscrivait son adaptation dans un style sinon plus urbain, du moins plus proche des polar pulp 40's en remplaçant le médecin par une figure plus familière (et caricaturale), celle du privé hardboiled.
Doté d'une esthétique télévisuelle trahissant sans nul doute un budget restreint, The Resurrected ne distingue, on l'aura vite compris, ni par sa photographie baveuse, ni par ses cadrages audacieux, ni par ses décors ou ses costumes bon marché, et encore moins par son montage contractuel. Pire, le long-métrage, fut selon les propos de la veuve du réalisateur, remonté sans l'accord de Dan O'Bannon, les producteurs ôtant par voie de fait l'humour injecté par l'ancien scénariste de Dark Star, et une décision sujette à caution tant les deux précédentes adaptations Lovecraftiennes signées par Stuart Gordon, Re-Animator (1985) et From Beyond (1986), jouaient crânement, et avec succès, la carte du grotesque. Autre décennie, autre mœurs...
De ces premiers constats, quasi rédhibitoires, The Resurrected serait donc à classer, sans appel, à la fois dans les déceptions et dans la catégorie des ratages. Or il n'en est rien. Considéré par certains comme l'une des meilleures adaptions du père du mythe de Cthulhu, si le film accumule comme dit précédemment plusieurs imperfections notables (en sus de l'interprétation moyenne des acteurs concernés et la croquignolesque musique de Charles Band), The Resurrected n'en demeure pas moins fidèle à l'horreur Lovecraftienne, l'ambiance se dégageant en particulier lors du dernier tiers, et la découverte de l'ancien laboratoire de Curwen, étant sans aucun doute l'une des véritables réussites du long-métrage : mystérieuse, poisseuse et lugubre à souhait (l'aspect lo-fi de cette production apporte paradoxalement un rendu satisfaisant, proche du found footage).
A découvrir.
http://www.therockyhorrorcriticshow.com/2018/02/the-resurrected-dan-obannon-1991.html