Une année difficile
5.4
Une année difficile

Film de Eric Toledano (2023)

Escrocs mais pas trop

Depuis l’immense succès d’Intouchables, les films d’Éric Toledano et Olivier Nakache suscitent toujours beaucoup de curiosité et d’attente. Jusque-là, ils se sont montrés plus qu’à la hauteur avec ‘Le sens de la fête’ et la série ‘En thérapie’. Imparfait cette fois mais globalement très drôle, leur nouveau film est une des bonnes comédies du moment.

Albert et Bruno sont surendettés et en bout de course, c’est dans le chemin associatif qu’ils empruntent ensemble qu’ils croisent des jeunes militants écolos. Plus attirés par la bière et les chips gratuites que par leurs arguments, ils vont peu à peu intégrer le mouvement sans conviction.

Comme à son habitude, le duo aime traiter par le rire des sujets du moment. Des associations prenant en charge des handicapés (‘Hors normes’) aux entrepreneurs (‘Le sens de la fête’), ils tâtent l’air du temps. En évoquant à la fois le surendettement et le militantisme écologique, cette dernière comédie ne déroge pas à la règle.

Comme à leur habitude, ils observent avec le sourire en coin mais avec bienveillance les activistes environnementaux. La bonne idée est d’introduire deux pieds nickelés dans cette association qui mènent des actions pour le moins musclées. Le duo montre comment ces deux mondes opposés vont s'entrechoquer. Le comique repose sur le contraste entre l’investissement des uns et le je-m’en-foutisme des autres. C’est classique, mais ça fonctionne très bien grâce à de bonnes répliques et des situations bien trouvées.

Scénaristiquement, les deux cinéastes partent d’un schéma assez classique du cinéma français (‘Les valseuses’ de Bertrand Blier, par exemple) : deux hommes dont la relation sera chamboulée par une femme introduite dans l’équation. Le seul défaut que l’on pourrait trouver au film, c’est l’histoire qui pêche aux deux tiers par un retournement scénaristique un peu grossier.

Mais ce qui m’a frappé, c’est que Toledano et Nakache ont vraiment gagnés leurs gallons en termes de mise-en-scène. Jusque-là, ce n’était par leur fort. Mais le film s’ouvre et se clôt sur deux très belles séquences. N’évoquons pas la fin, mais on peut parler du début. Après un pré-générique astucieux, le film s’ouvre sur un black-Friday à la Fnac où des consommateurs déchaînés dévalisent le magasin. Filmé au ralenti et avec ‘La valse à mille temps ‘ de Brel en bande-son pour le contraste, cette scène marquante se e de dialogues pour souligner l’obsession consumériste jusqu’au grotesque.

Le duo a également gagné en profondeur et savent émouvoir quand ils évoquent deux surendettés qui vivent de petites combines et dont l’un vit dans un aéroport. Ils touchent quand ils montrent le déclassement ou l’humiliation d’un surendetté exclut de sa propre famille, réduit à rester sur le seuil de la maison de sa sœur, pour éviter le beau-frère.

Comme d’habitude, Toledano et Nakache ont le sens du casting. Ils font appel à la valeur comique du moment Jonathan Coen (qui, sans surprise, fait du Jonathan Cohen). En revanche, ils utilisent à très bon escient Pio Marmaï, acteur constamment en surrégime mais là relativement sobre. Sans oublier, Noémie Merlant, valeur comique montante depuis ‘L’innocent’ de Louis Garrel.

Le film n’est pas exemplaire mais il est d’une qualité certaine. Eric Toledano et Olivier Nakache déploient leur savoir-faire et continuent de monter au panthéon (un peu déserté) des bons réalisateurs de comédies françaises depuis les sympathiques comédies de leurs débuts.

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le 1 nov. 2023

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Noel_Astoc

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