Dans un monde vidéoludique saturé de récits épiques et de mondes ouverts infiniment détaillés, ce jeu est un retour aux sources de l’action coopérative, et il s’invite en tant que réinterprétation moderne d’un classique de 1985. Loin des envolées lyriques et des quêtes grandioses, ce titre se contente de redonner vie à une expérience plus intime, où les quêtes sont aussi simples que l’élimination de monstres tout en accumulant des trésors. Si l’on s’abstient d’une analyse trop sophistiquée des motivations profondes de chacun des héros, l’on se trouve face à une proposition honnête : un jeu d'arcade pur, qui se prête à la frénésie collective et à la jouissance immédiate.
Le Gauntlet de 2014 conserve l’essence de son ancêtre, cette recherche du "high score" et du loot de gold, un peu comme un songe mécanique où chaque coup porté aux monstres est une petite victoire, presque primale. Le héros, qu’il soit guerrier, magicien, valkyrie ou elfe, s'enfonce dans des labyrinthes où chaque couloir semble s'ouvrir sur l’infini de la vanité. Le jeu est donc une célébration de l’action brute, de la logique en chaîne des objets à récupérer, des ennemis à trancher, et des pièges à esquiver. La simplicité de la formule devient, de fait, sa force : un mélange de combats frénétiques, de coopération (ou de trahison discrète, si l’on choisit le rôle du magicien), et de rires gras qui se distillent entre deux sessions de jeux endiablées.
Cependant, il serait faussement simple de se laisser emporter par cette nostalgie pour un temps révolue, celui où les pixels étaient nos seuls compagnons et où l’on se contentait de battre des monstres sans chercher la morale derrière chaque affrontement. Loin de cette illusion d’une époque dorée, ce jeu parvient néanmoins à redéfinir son propre héritage avec une présentation moderne et un gameplay fluide. Les graphismes, bien qu'assez sobres, ne sont ni impressionnants ni dérangeants. Ils s’inscrivent dans une esthétique qui rappelle davantage le jeu d’arcade des années 80 que les fioritures modernes. Ce qui importe ici, c’est l'intensité, le mouvement, la violence des affrontements, et la satisfaction éphémère de faire monter le compteur de points. La notion même de progression, avec ses trésors et ses power-ups, est une recherche de gratification immédiate – une philosophie du "juste assez pour ne pas s'arrêter", bien éloignée des mécaniques de grind interminable.
L'humour discret du jeu, notamment à travers les répliques des personnages et les situations cocasses qui émergent dans l'urgence de la bataille, confère à l'ensemble une légèreté agréable. Il n'y a ici pas de quête héroïque à accomplir, pas de grande prophétie à déjouer ; juste des amis, des écrans qui se remplissent de chaos, et l'illusion d’un "jeu parfait" pour les moments de pure distraction.
Gauntlet est un jeu de plaisir immédiat, parfois un peu répétitif, mais toujours fidèle à lui-même, un titre qui ne se soucie pas de redéfinir le genre, mais qui lève fièrement le flambeau de la distraction arcade. Il mérite amplement sa note, non pas tant pour son innovation, mais pour sa capacité à s’imposer dans le paysage actuel avec la simplicité d’une promesse tenue. Un jeu d’arcade moderne pour des moments fugaces de pure jubilation.