Jeu du bien nommé Julien Eveillé, édité par Critical Reflex, assez connus au côté de Pumpet Combo, pour leurs jeux singuliers à l’esthétique Low Poly (VHS/PSX) toujours délicieuse.
Le pitch de départ est somme toute assez banal et convenu ; dans un futur proche (ou plutôt dans un é incertain), on incarne un quidam lambda, qui se retrouve (malgré lui?) engagé dans un travail - gouvernemental - des plus étranges et des moins conventionnels selon nos standards.
L’introduction ne perd pas de temps à faire de l’exposition, le jeu commence directement sur les chapeaux de roues en intégrant son tutoriel de manière diégétique et presque punitif, lors de la première partie (car vous allez au moins recommencer une fois, avec la mort permanente).
On apprend donc les choses à la manière d’un trial and error. C’est frustrant de prime à bord, car on erre souvent (lors de sa première partie) dans cette espace assez confiné, en quête de tâches à accomplir. Car, entre autres tâches, s’immisce une sorte de routine, celle qui consiste à remplir un sceau plein de saloperie blanchâtre, à récupérer des tickets d’oxygène et à réguler la vitesse de ce foutu train à la destination inconnue et au contenu incertain. En arrière plan, commence à se profiler une drôle d'ambiance nous rappelant la sombre époque de l'URSS et du stakhanovisme.
Sans nous en rendre compte, peu à peu, le jeu ainsi nous aliène de manière sournoise mais magistrale, en nous confrontant à ces tâches répétitives, qui semblent n’avoir strictement aucun sens. La narration se fait sans nous rien dévoiler du scénario opaque et cryptique.
Le jeu nous pose ainsi des questions assez actuelles d’ailleurs, en nous confrontant au rapport que nous entretenons avec notre vie professionnelle, qui finalement nous déshumanise peu à peu en des tâches répétitives et dans des missions vides de sens.
"Treshold", raconte un peu ce quotidien, celui d’un pauvre gars, dont les missions qu’on lui confie semble ne rimer à rien. Paradoxalement le jeu nous prend à contre-pied en nous faisant comprendre que le fonctionnement de cette gare est dans un équilibre précaire et vital pour tout le pays (ou tout du moins, pour la ville) et qui peut basculer à tout instant dans un chaos qu’on devine, total et aux conséquences dramatiques. Mais qui, quoi et qu'est-ce? Le je se dévoilera ainsi lentement mais sûrement.
A cela s’ajoute une dimension très futuriste, voire carrément SF, avec l’antichambre par le biais duquel on communique avec nos employés. Cela nous rappelle un peu les Être du Bulk dans "Interstellar" ou la salle des Heptapodes dans "Premier ". Y a même un côté "Snowpiercer" dans le dénouement, vite fait.