Cover On the row

On the row

Cette année, sur ma table de chevet...

[ Pour les autres années c'est ici :
2011 =
https://link.infini.fr/OTR11
2012 =
https://link.infini.fr/OTR12
2013 =
https://frama.link/OTR13
2014 =
https://frama.link/OTR14
2015 =
https://frama.link/OTR15

Afficher plus
Liste de

21 livres

créée il y a 5 mois · modifiée il y a 11 jours
Jeux de lumière
8.1
1.

Jeux de lumière (2023)

Lichtspiel

Sortie : 5 février 2025 (). Roman

livre de Daniel Kehlmann

Chaiev a mis 8/10.

Annotation :

Hasard, synchronicité, effet de mode ? En tout cas voilà en très peu de temps un troisième roman (allemand cette fois, après un chilien et un français) qui traite d’un personnage historique et misant sur la carte des multi-narateurs/trices. Ce qui permet de confirmer en tout cas que le dispositif, un peu dangereux, fonctionne surtout quand il vient en renfort pour dessiner une situation ou un personnage avec l’idée non pas de tout révéler de lui mais bien de garder intact l’épaisseur du mystère qui l’entoure (ce qui manquait cruellement au roman de Pattieu). On pourrait appeler ça le théorème d’Eve, pour rendre hommage à Mankiewiecz. Surtout qu’ici on baigne justement dans le milieu du cinéma puisque le personnage en question n’est autre que GW Pabst, excusez du peu, et la situation : son étrange décision de rentrer en Autriche en 1939 à quelques jours de la déclaration de guerre. Le croisement entre une vie, une œuvre et un contexte historique extra-ordinaire ne suffit sûrement pas à faire un bon livre, mais décidément Kehlman est un conteur hors pair qui vous emballe ça dans des boites gigognes lui permettant de tenir l’intéret en éveil jusqu’au bout, non sans se payer le luxe en ant de réinventer un film disparu et de surprendre son lecteur par des coups de théatre ni trop absurdes ni trop convenus.

2.

Je ne vous dis pas adieu... (1973)

Triste, solitario y final

Sortie : 1978 (). Roman

livre de Osvaldo Soriano

Chaiev a mis 4/10.

Annotation :

Un roman arhentin qui ne se e pas en Argentine, mais à Hollywood, qui plus est pour mettre en scène une rencontre improbable entre Marlowe et Soriano lui-même, à la recherche de Stan Laurel. Voilà qui promet du joli foutraque mélangeant imaginaire et réalité comme savent si bien le faire les Argentins, dans un décor bigger than life, pour des péripéties folles dignes des plus grands slapsticks ?
Ouais ben non, c’est un ratage absolu et désespérant, ça tourne en rond, ça ne va nulle part, c’est la même situation répétés 30 fois, les clins d’œils sont lourdingues et les personnages totalement horripilants. Pire qu’un mauvais film de Laurel et Hardy, c’est dire...

Le Bonheur pauvre rengaine
5.8
3.

Le Bonheur pauvre rengaine (2013)

Sortie : 17 août 2013. Roman

livre de Sylvain Pattieu

Chaiev a mis 5/10.

Annotation :

Marseille, les années 20, la Pègre, les illusions des unes, les désillusions des autres, tout ça était des plus alléchant. Mais ça reste totalement lettre morte, ça ne fonctionne pas du tout. Ok, la fiction est censée pouvoir remplir les interstices, le roman venir combler les blancs, redonner de l’épaisseur aux fantôme qui n’ont pas la chance d’avoir laissé plus de traces que quelques lignes dans la rubrique des faits divers, n’empêche pour que la sauce prenne il faut un minimum de tour de main. Mettre tout dans la casserole et fermer le couvercle, sans remuer et sans allumer le feu en dessous, ben ça marche pas. Plat, poussif et pas inspiré, même le truc de changer de narrateur régulièrement, ça marche pas à tous les coups hein, bien au contraire ! Bref, une grosse déception.

4.

Les Taupes

Los topos

Sortie : 26 août 2010 (). Roman

livre de Félix Bruzzone

Chaiev a mis 7/10.

Annotation :

Pour continuer sur le principe évoqué précédemment au sujet des romans argentins contemporains, et du défi que représente la décision d’écrire encore et encore sur les conséquences de la dictature, on a avec les Taupes une nouvelles variations,qui croisent de façon assez inattendue, mais très intéressante, l’autre grand thème phare de cette littérature depuis une dizaine d’année:la transidentité. Je ne veux pas trop déflorer la façon dont les deux s’hybrident ici, mais il s’agit une nouvelle fois d’un jeu troublant entre phantasme et traumatisme, imaginaire et séquelles, héritage et terreur, avec un narrateur qui se débat comme il peut avec une histoire familiale qui le dée et pourtant le (dé)construit, et qui le pousse au plus loin dans la perte de repère, psychologique comme géographique.

5.

Laïcité (2023)

Sortie : 5 octobre 2023. Essai, Culture & société

livre de Stéphanie Hennette-Vauchez

Chaiev a mis 8/10.

Annotation :

Texte très court (l’équivalent d’un article un peu fouillé) et qui va doit au but – c’est le principe de cette très salutaire collection d’Anamosa, tenter de remettre à l’endroit des notions qui ont été volontairement tordues et dévoyées à des fins de pure instrumentalisation. Où comment changer le sens des mots pour tripatouiller en toute bonnes conscience et mauvaise foi la réalité.
Le propos de Hennette Vauchez, prof de droit, est clair et percutant. Pas d’effet de manche, pas de grande théorie, juste l’énoncé des faits (des méfaits) qui ont poussé petit à petit des gouvernements iniques à instaurer un racisme d’état sous couvert de légalisme républicain. On en viendrait presque à espérer que le livre ne soit jamais traduit, tant on le referme avec la honte d’être Français.

6.

Le Cœur pur (1929)

The True Heart

Sortie : 1989 (). Roman

livre de Sylvia Townsend Warner

Chaiev a mis 8/10.

Annotation :

Au départ, le principe de transposer le conte d’Apulée sur les amours de Psyché et Cupidon dans l 'Angleterre du XIXe siècle (après les tentatives plus ou moins heureuses de La Fontaine sous Louis XIV) fait un peu peur. Mais c’est sans compter l’incroyable style de Townsend Warner, qui semble-t-il pourrait réécrire le botin sans être ni vaine ni ennuyeuse. A vrai dire, on oublie finalement assez vite de tirer des parallèles entre les épisodes mythologique et les aventures picaresques de cette pauvre Sukey, qu’un amour pur et absurde dirige à travers tout l’Angleterre victorienne. Peut-être l’autrice n'a-t-elle choisi une contrainte aussi insolite que pour démontrer que rien ne pouvait empêcher chez elle la verve du propos et la profondeur de l’émotion. Ou pour une autre raison. Ou pour aucune. Il ne faut que quelques pages pour oublier tout ça, et profiter de cette plume alerte et inspirée, sans autre arrière-pensée que le plaisir pur de la lecture.

« Peut-être était-ce l'obligation de ne dire du mal de personne qui avait fait de Zeph un homme taciturne. On devait se montrer circonspect, le mal vous échappe si vite ; alors, peut-être, un jour, l'idée vous venait que la tactique la plus sûre et la plus simple était de ne rien dire du tout. »

7.

L'Expérience Giono

Récit

livre de Jean-Luc Sahagian

Chaiev a mis 5/10.

Annotation :

Ok donc comme Jean-Luc aime beaucoup Giono, il a très envie de raconter son expérience de vie collective pendant les années du Contadour, surtout que lui aussi, Jean-Luc, a vécu une expérience analogue dans un village des Cévennes. Ouais bon le hic c’est que non seulement Magnan l’a déjà raconté, mais qu’en plus Magnan l’a vécu en direct, lui. Forcément du coup il ne reste pas grand-chose à raconter sur le Contadour. A la limite si Jean-Luc en profitait pour raconter son expérience dans les Cévennes au moins on apprendrait quelque chose sur Jean-Luc à défaut d’apprendre quelque chose sur Giono, ou sur Magnan. Mais non en fait, cette veine là est très peu creusée, l’auteur préférant ne rien cre du tout, empiler quelques considérations ennuyeuses, et attendre que le nombre règlementaire de pages soient écoulés pour mettre un point final à ce récit très inutile. Bon.

8.

Purgatoire (2008)

Purgatorio

Sortie : 31 mars 2011 (). Roman

livre de Tomás Eloy Martínez

Chaiev a mis 8/10.

Annotation :

Roman après roman, les auteurs et autrices argentin-es n’en finissent pas de remettre sur le métier les traumatismes liés à la sordide dictature de 1976. D’aucuns pourraient considérer que le thème est un peu trop circonscrit pour ne pas devenir répétitif, mais en fait ce risque se transforme plutôt en richesse supplémentaire, puisque une gageure apparaît au fur et à mesure que les années ent : comment raconter son trauma en se démarquant, comment faire pour ne pas faire comme ceux et celles d’avant. Bon ça tombe bien, la littérature argentine ayant toujours été particulièrement à la pointe en terme d’innovation stylistique et narrative. Ici donc, Eloy Martínez opte pour une temporalité éclatée, où toutes frontières devient particulièrement poreuse. Entre aires géographiques, entre é et présent, entre réalité et fantasmes, souvenirs et cauchemars, fiction et témoignage. Plutôt que d’opter pour la plainte et le ressentiment, il préfère plonger son héroïne dans un flou ambivalent, où les détails sont d’autant plus acérés que l’image générale se fait fuyante. Poésie cruelle de la cicatrice, qui en s’effaçant se renforce et en se montrant ne fait qu’occulter toujours un peu plus l’accident.

« Emilia paraissait anxieuse de se livrer, mais à ce moment-là elle avait plus de questions que d’histoires et plus de désirs que de questions. Ses désirs, pourtant, étaient impossibles à atteindre, ou bien elle les avait peut-être déjà atteints à son insu. Rien n’est plus terrible que désirer ce que l’on a en croyant qu’on ne l’aura jamais. »

Sarn
8
9.

Sarn (1924)

Precious Bane

Sortie : 1924.

livre de Mary Webb

Chaiev a mis 8/10.

Annotation :

Webb a un peu disparu de nos radars, avouons-le, même si dans les années 20 elle jouissait d’une certaine notoriété des deux côtés de la Manche. Il faut dire aussi qu’elle eut une carrière éclair (entre 1917 et 1924) avant que la maladie ne l’emporte à 46 ans. Sarn est le dernier de ses cinq romans, et le titre français renvoie à la fois au nom de famille de l’héroïne et au nom de l’étang près duquel elle vit avec sa mère et son frère. Cet ancrage à la terre, à l’environnement, ce continuum entre paysages et personnes est caractéristique du style assez particulier de l’écrivaine. On pourrait presque se croire dans un roman de Hardy, n’était le mode de narration diamétralement opposé. Point de regard surplombant, point de recul, ici c’est l’héroïne elle-même qui nous présente son histoire, elle la paysanne qui a eu la chance d’apprendre à lire et à écrire grâce à un voisin que tout le monde accuse de sorcellerie. On est donc plongé dans un quotidien à la fois âpre et foisonnant, cruel et merveilleux, sans aucune médiation. Et Webb tient cette ligne tout du long, avec un très grande naturel. De tout voir à travers les yeux de Prue permet de rendre au plus près l’indicible et les mystère du monde, là où la nature semble transcender les catégories, morales ou psychologiques, des êtres humains. Monde mêlé que le titre original résume particulièrement bien : un si précieux fléau.

Le Dernier Été en ville
7.3
10.

Le Dernier Été en ville (1973)

L'ultima estate in città

Sortie : 4 février 2021 (). Roman

livre de Giancarlo Calligarich

Chaiev a mis 7/10.

Annotation :

Rome, années soixante. Le monde de la télé, des journaux, les étudiantes volages, les garçons trop sensibles et romantiques. La nuit, les cafés, le farniente qui flirte avec l’ennui, l’ennui avec le vide, le vide avec le vertige. Ah forcément, c’est tellement cinématographique, tellement chargé d’images et de sons, que Calligarich n’a plus grand-chose à faire pour que l’imagination de ses lecteurs et lectrices vagabonde. Un peu comme ces livres d’enfants en trois dimensions, qui se transforment en décor jaillissant au moment où on tourne un page. Mais néanmoins, l’auteur ne se laisse pas non plus complètement submerger par ce contexte sur référencé, il en joue, il s’en distancie par moment, il s’offre le luxe de nager à contre courant, notamment en confiant la voix narrative à son personnage principal, qui a mesure que le livre avance, se transforme de désabusé en écorché.

« Mais c’est toujours pareil, si on est ce que l’on est, ce n’est pas grâce aux personnes que l’on a rencontrées mais à celles que l’on a quittées. »

L'Affaire Moro
7.1
11.

L'Affaire Moro (1978)

Sortie : 1978 (). Essai

livre de Leonardo Sciascia

Chaiev a mis 9/10.

Annotation :

Le livre a beau ne faire qu’à peine 150 pages, on ne sait où donner de la tête, on ne sait ce qui mérite le plus d’éloge : la finesse de vue de Leonardo (qui écrit cette analyse d’un évènement si complexe à peine trois mois après les faits), sa puissance humaniste, son humour corrosif, sa tendresse et sa rage mêlée, son style toujours aussi parfait. Bien sûr, la question est rhétorique, il n’y a pas besoin de choisir, mais c’est comme dans les boites de chocolats où tout est tellement bon qu’en quelques minutes on se rend compte qu’on a tout vidé sans même faire attention à chaque merveille proposée.

« "En exécutant" : gérondif présent du verbe exécuter. Un présent dilatable. Et on préfère le dilater vers le futur, vers l’espérance. "Toute notre attention, déclare le directeur du journal démochrétien Il Popolo, est concentrée sur le gérondif."
On peut douter qu’une concentration sur le gérondif ait jamais servi ou puisse jamais servir à sauver une vie : mais, désormais, nous sommes dans le surréel. Plein d’espérance, le gérondif monte comme un ballon à l’hydrogène : flotte entre les directions des Partis, les rédactions des journaux, la radio, la télévision, les conversations des gens. Non pas le gérondif présent du verbe exécuter, mais le mot gérondif. Un bon tiers de la population italienne se demande ce qu’est ce gérondif à quoi l’on s’en remet pour sauver la vie de Moro. Serait-ce un synonyme d’intérmédiaire ? Serait-ce un organisme d’une autorité morale supérieure à celle du pape ? Serait-ce un corps de police spécial, particulièrement entrainé et équipé pour des actions d’un risque extrême et d’une extrême précision ? Serait-ce le nom d’une personne qui a un certain pouvoir sur les Brigades rouges ?
La vie et la mort d’Aldo Moro - la vie ou la mort - perdent de leur réalité : elles ne sont présentes que dans un gérondif, elles ne sont qu’un gérondif présent. »

Histoire d'une domestication
7.6
12.

Histoire d'une domestication (2019)

Sortie : 19 août 2024 (). Roman

livre de Camila Sosa Villada

Chaiev a mis 7/10.

Annotation :

Après les Vilaines, Sosa Villada continue son cheminement aux côtés d’une héroïne trans, mais en changeant diamétralement d’univers et de dispositif. Fini le roman choral dans le monde bariolé des prostituées portègnes, un splendeurs et misères des temps modernes, poétique et butal : pour ce deuxième roman (paru en Argentine la même année), la romancière revient à un récit plus conventionnel (même si elle opte pour une déconstruction temporelle qui ne parvient qu’à moitié à remplir sa tâche) et raconte plutôt les Illusions perdues d’une actrice ultra connue qui doit lutter sur tous les fronts : discrimination, vie conjugale, maternité, vieillissement. CSV choisit de camper un personnage particulièrement désagréable, et sur ce point-là elle mène bien sa barque : ni apitoiement, ni fausses excuses, les facettes sont suffisamment subtiles pour qu’on suive son parcours sans jamais l’aimer ni non plus vraiment la détester. Mais ce parti-pris a une contre-partie : toutes ces facettes, creusant toujours avec courage là où ça fait mal, finissent par noyer un peu le roman, qui se répète, fait du sur place, saigne de partout sans aucun espoir de cicatrisation. L’autrice ne cherche pas notre assentiment, position inhabituelle que je trouve très valeureuse pour ma part. D’où une sorte de sentiment désemparé au cours de la lecture que je pourrais ainsi résumer : « C’est fort mais c’est lassant. C’est lassant mais c’est fort ».

MANIAC
7.6
13.

MANIAC

Sortie : 4 septembre 2024 (). Roman

livre de Benjamin Labatut

Chaiev a mis 8/10.

Annotation :

Il y a toujours un petit danger avec les œuvres à concept, ou disons à construction structurelle forte, c’est qu’elles se laissent un peu dévorer par le principe qui la soutien. Mais je trouve que Labatut s’en sort très bien : l’idée directrice de ne présenter le personnage pivot du livre – la mathématicien Von Neumann, à l’origine des ordinateurs – qu’à travers les différents témoignages de ceux et celles qui l’ont cotoyé n’est une gageure de taille (l'idée n'était ni difficile à avoir ni facile à ùettre en oeuvre), mais il semble se rire des embûches grâce à un sens aigu du montage et du dialogue intérieur. L’avantage, outre l’effet « all about Eve », c’est que ça place l’oeuvre en train de s'écrire au centre de la problématique générale : quels sont les rapports entre la réalité et un concept chargé de la résumer/représenter et à partir de quel moment on risque toujours de basculer de la représentation au remplacement. D’où la coda du livre, quelques décennies après la mort du génie tourmenté, autour de la lutte entre le champion Sedol et Alpha Go, la première intelligence artificielle spécialisée dnas le jeu de go. Faite ainsi, par collages et analogies, la démonstration n’en devient que plus implacable, sans didactisme aucun

Paresse pour tous
7.4
14.

Paresse pour tous (2021)

Sortie : 6 mai 2021. Roman

livre de Hadrien Klent

Chaiev a mis 5/10.

Annotation :

C’est un peu schizophrène ce truc : d’un côté l’histoire est marrante, et les arguments développés par le héros, prix nobel d’économie qui s’improvise candidat à la présidentielle, pour justifier son goût du farniente à l’échelle d’un pays, plutôt emballants (disons qu’on a vraiment envie d’y croire), mais de l’autre coté c’est vraiment pas bien écrit. Le style est plat, ce qui est déjà problématique, mais surtout la façon de présenter tout ça ne décolle jamais, et suit un schéma particulièrement scolaire et appliqué. Du coup on aimerait s’arrêter, mais aussi continuer, mais aussi s’arrêter (malin d’avoir situé ça à Marseille)… Dans ces conditions, j’en viens même à me demander si le roman était la forme la plus idoine. En tout cas il aurait fallut quelque chose de plus inventif que ce déroulé convenu, comme pré-mâché pour une sitcom à venir.

15.

1977 (2008)

77

Sortie : 5 mars 2020 (). Roman

livre de Guillermo Saccomanno

Chaiev a mis 8/10.

Annotation :

Evidemment, la période noire de la dictature de Videla et consorts (celle de 1976-83, à ne pas confondre avec la dictature de 43-46, ou celle de 55-58, ou celle de 66-73, on finirait par s’y perdre face à tous ces généraux putschistes et fascistes ) est l’évènement le plus représenté dans la littérature argentine de ces trente dernières années, tant le traumatisme lié à la persécution politique, au climat de terreur et aux adoptions forcées a marqué la nation tout entière. Comme si la littérature, encore plus que le cinéma, était le catalyseur de tous les cauchemars, les non-dits, les refoulements qui hantent l’Argentine depuis lors. Dans ces conditions, à chaque auteur ou autrice de trouver sa spécificité ou son point de vue, comme récemment Enriquez et ses virées dans le roman d’horreur gothique (Notre part de nuit). Saccomano, lui, choisit des expédients moins sanguinolents, mais parvient néanmoins à tricoter un roman original sur ce thème si souvent traité, notamment en choisissant de laisser parler à la première personne un narrateur particulièrement velléitaire, en marge et peu engagé, qui cherche à disparaître, à se fondre dans le décor, à se faire oublier, plutôt qu’à lutter contre le Mal qui s’insinue partout. Le pays entier semble baigner dans une atmosphère nocturne et poisseuse, étrange et feutrée, où le silence et les silhouettes furtives finissent par être plus inquiétantes d’être si inexorables et pourtant fuyantes. Le roman se développe sur des grandes plages de vide, et l’anxiété naît, comme dans les vieux films d’épouvante, d’un hors champ qui reste dans l’ombre. Quelque chose quelque part va surgir, mais où et quoi, c’est à peine si on aura le temps de le pressentir avant de disparaître dans l’oubli, ce châtiment au carré qu’a inventé l’ennemi pour durer même après son éradication.

Bristol
6.6
16.

Bristol (2025)

Sortie : 2 janvier 2025 (). Roman

livre de Jean Echenoz

Chaiev a mis 5/10.

Annotation :

Je ne sais même pas si je peux parler de déception, parce qu’à faire les comptes ça faite très longtemps que le seul crédit que je donne encore à Echenoz est de savoir faire des livres courts. Au moins c’est pas trop pénible à lire. Ca fait pas bézef. Ouais mais bon, on espère quand même toujours un peu, on se dit c’était ager (un age de 25 ans, ça fait beaucoup!), quelqu’un va lui dire et il va se reprendre (un éditeur ou une éditrice chez Minuit ? Ah ah ah la bonne blague). Bref, non seulement le deuil a du mal à se faire, mais là ça en devient quasiment nécrophile, à ressortir le cadavre pour vérifier, le re-rentrer, et le ressortir au livre suivant. Va falloir arrêter monsieur Chaiev, fermez le frigo, ez à autre chose et n’en parlons plus.

Écrit sur de l'eau...
6.1
17.

Écrit sur de l'eau...

Sortie : 1908 (). Roman

livre de Francis de Miomandre

Chaiev a mis 9/10.

Annotation :

On est ici un peu dans la famille des oubliés de la Belle époque, encadrés en amont par les Décadents et en aval par les Surréalistes. Miomandre est frère de Toulet, Boylesve, de la Ville de Mirmont ou Tinan : ces stylistes élégants plus légers que leurs ainés (mais non moins mélancoliques) et plus nonchalants que leurs successeurs (mais non moins écorchés) qui ont comme politesse du désespoir une sorte d’humour tendre et faussement détaché. Le roman de Miomandre file à toute vitesse sur les pas de Jacques de Meillan, jeune poète marseillais qui n’écrit pas, amoureux impénitent et fils d’un père hableur éternellement ruiné. Comme dans un film de la Nouvelle Vague (sauf qu’ici ce n’est pas la caméra stylo mais le stylo caméra) le narrateur nous embarque à ses trousses le temps de quelques épisodes joyeux et foutraques, racontés et commentés avec une verve taillée dans la plus parfaite ironie, celle qui fait de chaque gifle une caresse, et de chaque caresse une gifle.

« Et puis je t'assure, pour peu que tu aies aimé les femmes, la mer, les couchers de soleil, la littérature symbolique, les relations au hasard et les petits animaux familiers et que tu aies trouvé, en toutes ces formes de tes désirs, les désillusions et les mécomptes que la Providence te permit d'en retirer pour ton perfectionnement moral, tu te retrouveras dans le héros de ce livre. Si tu aimes t'attarder quand tu es en route et ne regarder que les magasins du trottoir de gauche quand tu suis fidèlement, sans en rien voir, le trottoir de droite, si tu connais les charmes du loisir et de la divagation, tu goûteras mon livre. Il ne demande aucun effort pour être lu. Que tu l'ouvres par le milieu, il te sera aussi intelligible que si tu l'abordes au premier chapitre. Pareil à l'éternité, il n'a ni commencement ni fin, mais il est moins long. »

L'Énigme de la Blancarde
5.9
18.

L'Énigme de la Blancarde

L'Énigme de la Blancarde

Sortie : 19 octobre 2005 (). Roman

livre de Jean Contrucci

Chaiev a mis 5/10.

Annotation :

Suite des tentatives d’épuisement d’un lieu (oups, pardon Georges), avec un coup pour rien. Pas méchant, même pas forcément mauvais, mais on a un peu l’impression d’avoir à faire à de la littérature IA vingt ans avant l’heure : c’est un peu fade, un peu convenu, et franchement sans personnalité ou aspérité. J’imagine que ça fait er le temps, mais bon alors dans ces cas là je préfère regarder les flots et leurs reflets sur le Vieux Port, ou la pleine lune derrière l'épaule de la Bonne Mère. Ah si une chose à mettre au crédit de ce polar plan plan : c’est marrant d’avoir quelques instantanés du Marseille Belle Epoque, c’est pas si fréquent et plutôt bien distillé. Mouais.

19.

Un sacré bout de chemin (1937)

A Long Way from Hom

Sortie : 7 juin 2022 (). Récit, Biographie

livre de Claude McKay

Chaiev a mis 7/10.

Annotation :

Cette façon qu’a Mc Kay d’écrire à la va comme je te pousse est d’autant plus efficiente qu’elle ne semble pas particulièrement étudiée ou calculée. Aucune pose, aucune stratégie, ou plutôt la stratégie du lâcher prise, avec la grâce qui découle d’un tel oxymore. Oui c’est foutraque et tout hirsute, comme l’était aussi Banjo, mais de toute façon qu’il s’agisse d’un roman ou comme ici d’une autobiographie, l’idée est plus de capter des secousses et des vibrations – la vraie nature dont se revendique Mc Kay est d’être poète. Bon et puis il y a quand même cette chance de découvrir à travers le texte tout un pan complètement escamoté de l’histoire sociale et littéraire du début du siècle, celle d’un écrivain noir qui se promène, de Frank Harris à Trotsky, de la Jamaique à Marseille dans les remous politiques et sociaux d’un Occident déboussolé et furieusement classiste/raciste. McKay s’en amait presque, car il est de nature bonhomme, mais c’est aussi un écorché vif qui a choisi ses propres moyens de lutter, ceux du témoin lucide ni dupe ni soumis.

Un linceul n'a pas de poches
7.5
20.

Un linceul n'a pas de poches (1937)

No Pockets in a Shroud

Sortie : 1946 (). Roman

livre de Horace McCoy

Chaiev a mis 5/10.

Annotation :

Amère, cruelle déception. Gallimard a beau avoir ressorti une version revue et corrigée de la vieille traduc à trou (un grand classique de la Série Noire du temps de Duhamel qui rabotait sans aucun problème histoire de ne jamais déer les 250 pages) y’a vraiment pas grand-chose pour sauver le bouquin. Et pourtant ! Mc Coy est un authentique gaucho (non pas à cheval, de ceux qu’on achève bien, mais à gauche quoi) et il s’empare d’un sujet en or, bien décidé à clamer haut et fort la collusion scandaleuse entre journalistes, ruffians et politiques corrompus. A tel point d’ailleurs que le livre paraitra en Angleterre d’abord, personne n’ayant le courage de le sortir dans les Etats Unis de 1936. Ouais mais voilà, un roman ça reste un roman, et quand il est à ce point là mal écrit, ben pour moi plus rien ne tient. Sans compter que je ais mon temps à penser à ce que Steinbeck en aurait fait, forcément la mouise pour Horace. Des dialogues insipides, des scènes qui patinent, une maitrise très aléatoire des temporalités romanesques, é 30 pages j’ai vécu un calvaire pour arriver au bout, malgré toute la sympathie gênée que j’avais pour l’entreprise.

21.

Morceaux de prose (1917)

Sortie : août 2008 (). Recueil de nouvelles

livre de Robert Walser

Chaiev a mis 7/10.

Annotation :

Toute l’oeuvre, et peut être même toute la vie, de Walser est en morceaux. Il fait partie, à côté de Kafka, de ces poètes absolus du fragment, ces éclats, ces tessons qui coupent traitreusement tous ceux qui tentent de les prendre en main, lecteur aussi bien qu’auteur. Plus la prose semble simple à circonscrire et plus elle échappe à la compréhension : Walser est un tisseur de nuages déjà bientôt effilochés. C’est cet état gazeux de l’esprit qu’il sait capturer sans l’abimer, sans le dénaturer. Et plus il dit qu’il dit et plus il s’efface, quand d’autres fois, pour faire bonne mesure, plus il s’efface et plus on sent sa présence aussi implacable que sans importance.
« Que la vapeur vous soit légère ! », comme disent les Russes.

Chaiev

Liste de

Liste vue 391 fois

14
4