Histoire éternelle… qu’on croit connaître mais qu’il est toujours intéressant de découvrir dans sa version originale. Mais mon avis sur celle-ci assez mitigé.
Tout d’abord, tout est tellement kitsch que même la version de Disney semble sobre en comparaison ! Mais d’un autre côté, il est assez intéressant de voir l’autrice développer les éléments merveilleux de son conte, qu’il s’agisse de la société des fées ou du château enchanté (avec, par exemple, la chambre extraordinaire depuis laquelle on peut assister à tous les spectacles parisiens). J’y retrouverais presque, avec beaucoup moins de réussite, la tentative de créer tout un monde fantastique qui a animé Tolkien.
Mais l’intérêt principal du conte selon moi est sa dimension onirique. En effet, alors que les journées de la Belle, confinés dans son château, se ressemblent toutes, c’est par rêves successifs que progresse l’intrigue. C’est à la fois très original et crée une atmosphère très particulière.
Par contre, toute la fin du conte m’a semblé assommante. On y apprend, avec des détails infinis, que la Belle est en réalité la fille d’un roi et d’une fée (et la cousine de son mari), mais il me semble qu’il aurait été plus intéressant, du moins pour un lecteur actuel, de faire de la Belle la fille d’un marchand. Et la description de la hiérarchie sociale des fées et de leurs règles matrimoniales est d’un ennui !
Et que dire de la misogynie de du conte ! Sa morale est assez évidente : l’homme est une bête effrayante, stupide et obsédée (Voulez-vous coucher avec moi ?, demande-t-il chaque soir). On pourrait presque dire que la Bête est une sorte de sexe géant : un des seuls détails physiques sur la Bête est sa trompe ! Et c’est le devoir de la femme de faire taire ses désirs, ses répulsions et ses dégoûts et de céder, par reconnaissance, aux appétits de l’homme (mais pas hors mariage, attention !), ce qui permettra à son mari de retrouver enfin son humanité, une fois assouvis ses instincts bestiaux… Tout cela est enjolivé par le merveilleux et l’écriture gracieuse du XVIIIe siècle, mais laisse à penser qu’il est bon, souvent que la vie ne ressemble pas à un conte de fées !