Je n'ai pas terminé ce livre. Peut-être ne le terminerai-je jamais. Ce n'est pas important. La moitié que j'ai lue m'aura marqué comme peu d'oeuvres en sont capables. Dans sa préface, Louis Pauwels propose de er un contrat avec le lecteur : hâtez-vous ! Ne lisez pas tout, surtout. Et par petits bout. L'homme d'intelligence élevée n'a pas le temps de lire, il a des femmes à conquérir et des travaux à finir. C'est ainsi que par cette préface d'une extrême habileté Louis Pauwels et Jacques Bergier donnent le ton paradoxal (dans un sens étymologique) de leur oeuvre. La couverture de mon édition montre des masques imbriqués les uns dans les autres. Je trouve cette illustration absolument génialissime tant elle élucide l'œuvre. Le matin des magiciens est-il un pur exercice de forme ? laquelle est surréaliste. Oui, la qualité littéraire du style de Pauwels est indéniable. Mais on ne saurait résumer Le matin des magiciens a un freestyle de poésie surrealiste et lyrique. Car l'érudition ou la pseudo érudition plutôt de Bergier qu'il contient relève également de l'oeuvre métalittéraire. Pauwels et Bergier nous mentent, nous savons qu'ils nous mentent, sans être certains, mais nous continuons à les lire. Plus un mensonge est gros, plus il e. C'est la leçon a retenir du succès public du Matin des Magiciens. Cette fiction metalliteraire relativise du même coup la Vérité (ce qui n'est pas le plus original) et le Croire (c'est déjà plus original). Surfant sur la suspension consentie de l'incrédulité, les auteurs intriquent le vrai et le faux, le mythe et le mensonge, la légende dorée et la légende noire. L'homme, qu'il croit en mode idéologique ou infra idéologique, ne croit que ce qui confirme ses préjugés. Et les Lumières ne sont pas les dernières a ce petit jeu. C'est typiquement la circularité des croyances que nous trouvons dans Le Matin des Magiciens. Il est inutile de dire que rien n'est sérieux, que tout n'est qu'un jeu d'ombres chinoises et de miroir aux alouettes, trancher de savoir si Pauwels et Bergier ont raison ou tort, c'est er à côté de la fécondité de l'oeuvre. Celle-ci suscite la réflexion et fait preuve d'une habileté remarquable !