En 1972, c'était un roman de SF alarmiste. 45 ans plus tard, c'est la bande-annonce infernale de ce qui nous attends d'ici cinq à dix ans.
Il y a une force d'évocation dans ce roman qui le rend à peine soutenable : pas de grandes descriptions, pas de personnages fouillés, pas de scénario alambiqué, juste le récit simple, à hauteur d'homme, d'une catastrophe annoncée. Il faut les voir, ces êtres ordinaires, vaquer à leurs occupations comme si de rien n'était entre deux irritations de la peau, bercés au rythme des déclarations d'un président dont les déclarations seraient à mourir de rire si elles n'étaient pas l'étrange reflet de celles de Donald Trump, tâchant de vivre comme si la montagne qu'ils ont bâti petit à petit ne menaçait pas de s'écrouler sur eux à tout instant.
Evidemment, les choses finissent par devenir hors de contrôle, déroulant une apocalypse localisée n'étant que l'introduction d'une sortie de route mondiale qu'on devine en arrière-plan, mais c'est le quotidien qui le précède qui glace le lecteur. Parce qu'à quelques années près, c'est le nôtre, et que les moutons du titre original -the sheeps look up- ont laissé er leur chance de changer les choses. Quand on voit l'accueil réservé aux Austin Train (personnage christique dont la destinée est particulièrement cathartique pour le lecteur) de notre époque, on peut s'interroger sur la capacité de l'être humain à se remettre en question. Regardons en l'air, au moins on ne verra pas le précipice...
N. B : Je ne connaissais pas John Brunner avant , et j'apprends donc qu'il ne s'agit là que de l'un des livres qui constituent sa "tétralogie noire", composée de quatre romans autonomes. Si le reste est du même acabit que Le troupeau aveugle, il va falloir er aux antidépresseurs avant d'en avoir fini un deuxième.