Investigation nothombienne, deuxième ! Après avoir été emballé par Premier sang quoi de plus naturel que de lire le précédent direct. Et je n'ai en aucun cas été déçu par cette seconde tentative de percer les mystères d'Amélie la belge.
Il y a tellement de dialogues dans Les aérostats qu'on est à la frontière hybride entre le roman et la pièce de théâtre. C'est la première chose qui m'a frappé et qui donne ce caractère si limpide de la lecture. Dialogues permanents entre la maîtresse et l'élève, entre l'initiée aux arcanes littéraires et le candide aspirant qui ne pouvait se douter que cela aurait tant d'impact sur sa vie.
Car c'est bien le sujet principal de Nothomb, la charge subversive de la littérature. Comme Lovecraft le prétendait, les livres peuvent rendre fou, et certaines de leurs associations encore plus. Ils élèvent, affranchissent et nous entraînent vers les sommets de la conscience ou dans les limbes de l'autodétermination.
Le Rouge et le Noir, l'Iliade, l'Odyssée, Le diable au corps, Le bal du comte d'Orgel, La Métamorphose, avec cette dynamite il y a de quoi exploser cent fois le cerveau d'un adolescent un peu sensible. Il est des composants à ne pas mélanger au risque de s'envoler au-dessus des toits du commun des mortels. Par exemple combiner Nietzsche et Philip K. Dick à un âge trop précoce peut vous condamner définitivement à l'originalité ou au bizarre suivant le niveau de bienveillance de l’œil qui vous contemple.
Pour conclure, sous des aspects formels un peu légers, Nothomb livre un ouvrage d'une grande profondeur. Les meurtres conclusifs démontrent qu'il n'est pas bon, contrairement aux idées reçues, de laisser à porter d'esprits fragiles en construction, une concentration trop importante d'explosifs littéraires. Pourtant il n'y a rien de plus émouvant qu'un jeune qui s’intéresse à la littérature mais à ses risques et périls.
Samuel d'Halescourt