« Il est de ces maisons, de ces existences, qui stupéfieraient les personnes raisonnables ».
Stupéfiant inceste que celui-là, que l’on se prétende raisonnable ou non. Touchés par la grâce de la lutte sans merci qu’ils se livrent bien malgré eux, Paul et Elisabeth, tour à tour – mais jamais concomitamment – nourrissons, adolescents, puis sexués, semblent ne pas trouver de réponse à la ion qui les dévore. Le décès d’une mère, l’abandon d’un oncle, les joies de l’opulence quotidienne vont achever de les conforter dans l’idée qu’une vie d’enfants ressemble à s’y méprendre à une vie d’adultes, ponctuée de rires, d’aventures, mais surtout de douleurs.
Car leur ion, à ces tyrans, fait mal. Elle achève, littéralement. Comment, sans renoncer aux plaisirs de l’imagination et de l’enfance, accepter l’éloignement de la sœur, puis du frère, embrasser un fonctionnement rationnel d’êtres « réfléchis et rangés » ? Paul s’accommodera de la plus plate solution qui soit : la résignation. Elisabeth, elle, choisira la sortie dramatique. On en a connu d’autres, des amours – labellisées « malsaines » – aussi machiavéliques que destructrices. La Phèdre de Racine ne nous contredira pas, ni La Machine Infernale de ce même Jean Cocteau, imaginée et construite trois ans après la rédaction des Enfants Terribles.
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