Avec Les Guerriers de l’Hiver, Olivier Norek délaisse le polar pour s’attaquer à un épisode méconnu de la Seconde Guerre mondiale : la guerre d’Hiver entre la Finlande et l’URSS (1939-1940). Il y raconte un combat inégal, celui d’un peuple contre un géant, porté par un esprit de résilience unique — le Sisu — et incarné par une figure quasi mythologique : Simo Häyhä, alias « La Mort Blanche », jeune sniper au sang-froid glaçant.
La force du livre, c’est d'abord son sujet, mais aussi sa résonance contemporaine. Sans insister, Norek laisse flotter un écho évident avec l’Ukraine. Il nous rappelle qu’hier comme aujourd’hui, avoir l'ours russe comme voisin, est synonyme de conflits larvés et de tension permanente. On est horrifiés par l’arrogance brutale d’un envahisseur sûr de sa puissance, prêt à sacrifier ses hommes par milliers, sans égard pour la vie humaine. On est tout aussi frappés par le silence de la communauté internationale. Les grandes puissances promettent, s’indignent à voix basse, jouent la montre.
Fidèle à sa méthode immersive, l’auteur s’est rendu sur les lieux, a affronté le froid, écouté ceux qui savent encore. Il s’est imprégné de cet environnement qui a joué un rôle déterminant dans la survie du peuple finlandais.
Des colonnes de chars contre de vieux fusils. Un million de soldats rouges contre des ouvriers et des paysans. Mais les conflits és racontent qu’il faut cinq soldats entraînés pour affronter un homme seul qui se bat pour sa terre, sa patrie et les siens, les mains accrochées à sa carabine, sentinelle derrière la porte de sa ferme barricadée.
(Ironie du sort : on pense beaucoup à Stalingrad, que les Russes ont dû défendre brique par brique quelques années plus tard, et au sniper au centre du film de Jean-Jacques Annaud.)
Le rythme, toujours soutenu, épouse celui de la guerre : heurté, haletant, parfois suspendu. Les chapitres courts claquent comme des salves, les descriptions nous plongent dans un « enfer blanc » d’une densité rare. Il parvient à rendre palpable le froid, la peur, la fatigue, sans tomber dans le pathos.
On peut regretter que les personnages manquent parfois de chair, écrasés par la densité du récit. À l’exception du lieutenant Juutilainen, la « Terreur du Maroc », figure d’autorité larger than life, tout droit sortie d’un film de guerre sous testostérone.
Malgré tout, Les Guerriers de l’Hiver est une lecture intense, habitée, et un vrai morceau de bravoure pour son auteur.