Mon chien Stupide , ou My Dog Stupid dans sa version originale , est un roman de John Fante paru en 1987 , soit près de deux années après le décès de son auteur. Quand on tape "réalisme sale" sur un moteur de recherche , et que l'on part en quête de quelques écrivains pouvant se réclamer de ce mouvement si intéressant , deux noms surgissent : Charles Bukowski - évidemment....le terme "sale" possède pour synonyme Bukowski sur Reverso - , et John Fante. L'un s'étant forgé à la lecture des écrits du second. Fils d'un maçon Italien , Fante est le type même de l'auteur tiraillé entre tradition et ouverture d'esprit. Pour preuve de ce combat interne , son oeuvre est particulièrement autobiographique.
Dans Mon Chien Stupide , par exemple , nous sommes introduits à l'existence d'Henry J. Molise , écrivain mais surtout scénariste italo-américain résidant avec sa femme et ses quatre enfants à Point Dume , soit à l'ouest de Malibu , au nord de Los Angeles. En Californie , en somme. Vieillissant , le bonhomme constate qu'en parallèle de sa perte de créativité , sa famille part à vau l'eau...Ses enfants - qui sont tout de même de jeunes adultes - sont désobéissants , provocateurs et méprisant à son égard et à l'égard de sa femme , Harriet. C'est dans cette atmosphère de tension qu’apparaît alors une bête : un akita rouge feu homosexuel du nom de Stupide. La créature , errante , va alors se lier à la famille Molise , pour le meilleur et le pire...
Surement l'une des lectures les plus fluides de ma vie. Même L'attrape-coeur, Ubik,Méridien de Sang et récemment Je, François Villon ne peuvent prétendre avoir été descendu aussi prestement que ce livre ci. Il faut dire que le style de Fante est incroyable , parce qu'il est justement sans détour. On va au plus profond des cœurs , de l'âme et des intentions sans virage abrupt. Et c'est plaisant sans être prise de tête.
Ensuite , je sais que ce livre m'a parlé - peut-être plus qu'à d'autre - parce que je suis moi même issu d'une famille italienne où ce désir de retour aux sources est très présente. J'en suis moi même victime parfois , de cette terrible nostalgie d'une chose que je n'ai jamais réellement connu , tel Tony Soprano ou Henry Hill dans un registre plus...mafieux. En fait , ce livre - et la bibliographie de Fante en elle même doit l'être elle aussi - est un livre universel dans le sens où il parle à l’essence de n'importe quel individu à la croisée des générations ; Fante condensait en lui même un tout progressiste , et son contraire nostalgique. D'où cette écriture intemporel , ce style presque sémite - et par là , j'entends ironique , doté d'un humour corrosif.
On suit les tracas de cet auteur vieillissant , et de ce clebs complètement obsédé avec en tête une tendresse immédiate. Alors c'est réacs par instant , mais vous en faites pas : ça se rattrape toujours. Les personnages , tous de la même famille , sont cash dans leurs propos ou leurs actions mais le regrettent quelques lignes plus tard , ou l'ironie de la situation - encore et toujours elle - fera qu'ils feront er tout ce qu'ils prenaient , plus tôt , pour des problèmes après de véritables soucis.
Où sont les frères Coen , j'ai envie de dire ?