Bonjour.
Ces "carnets" où sont inscrits les souvenirs d'un très jeune médecin envoyé affronter seul les difficultés triviales de l'humanité au début du 20 ème siècle, sont une source intéressante pour la compréhension à la fois de la profession médicale et de son public de patients.
J'y ai été particulièrement sensible, sans doute suite à une récente visite chez un médecin que j'ai trouvé hors de lui, sa précédente patiente lui ayant avoué avoir "même eu recours à une voyante et au pendule". J'ai trouvé le pauvre homme hors de ses gonds. Praticien âgé, il est, comme beaucoup de confrères, accablé tant par le nombre de malades que de gens incultes, inaptes à juger de ce que lui ne considère que comme une réalité médicale et donc de son seul domaine.
De mon côté, comme j'essuyais les dernières rafales de la tempête, je n'ai pû m'empêcher de lui faire remarquer que le dit "patient", quoi qu'il fasse ou ne fasse pas, est toujours le coupable de son mal, de qu'il a fait ou n'a pas fait, et des conséquences qui l'amènent à consulter.
J'ai bien cru qu'il allait me demander de prendre la porte et m'envoyer à mon tour consulter le Diable. Mais une lueur dans son oeil gris de colère m'a montré qu'il comprenait et ettait la (relative) justesse de la remarque.
La consultation se déroula sans encombres.
Cette petite histoire aurait pu figurer dans les sympathiques mémoires de sa pratique médicale que raconte Boulgakov.
Elles ont le mérite de se lire sur un ton léger, et de donner aussi bien au patient qu'au praticien de notre 21 ème siècle, une idée de ce qu'a pu être l'exercice de la médecine rurale, à une époque pas si éloignée, celle de nos parents et grands-parents, ici comme ailleurs, dans les campagnes d'Europe, à cheval, qu'il vente ou qu'il neige.
On y trouve cette forme de sacerdoce au service de la population, sans espoir ni de fortune ni de gloire, à la fois dans le respect de soi et l'adoration qui se récoltait en retour pour leur dévouement sans borne pour des "semblables" campagnards accablés d'une ignorance crasse.
Nous sommes, de part et d'autre, tous en mesure de savoir où en est ce problème parmi nous, citadins "évolués", juste un siècle de "lumières" plus tard, entre les mages et la Sécu.
Autre aspect, une question (d'actualité) que soulève malheureusement cette lecture : où en est aujourd'hui le niveau d'éducation du peuple, chez nous comme dans la Russie profonde ?
Bonne lecture à tous.