Salammbô, c'est un récit de 300 pages dans lequel tout tourbillonne. Tout y est sublime et épique : le décor est fabuleux, riche et magnifique ; les combats terribles, sanguinaires et inoubliables. Tout s'enchaîne, rien ne stagne, et on est emporté dans ce déferlement stupéfiant de splendeur et d'horreur.
Salammbô, c'est aussi un incroyable apport historique, faisant découvrir la guerre des Mercenaires du IIIe siècle avant notre ère d'une façon inédite et ionnante.
Salammbô, c'est aussi un personnage, l'incarnation de la pure virginité au milieu d'un Orient d'une violence inouïe, l'incarnation de la beauté parfaite et de l'opulence, de l'érotisme d'une époque. Une figure complexe, qui, tout en étant en retrait, est le coeur du roman, sa face cachée, d'une perfide candeur.
L'action commence et se termine par un festin tragique, et la boucle est bouclée : on a vu défiler devant ses yeux toute une atmosphère, une histoire à l'écriture parfaite et emphatique (n'est pas Flaubert qui veut), avec un début et une fin bien définis, à la façon d'un roman d'aventures, qui se veut historique tout en étant superbement irréel.
On notera la place accordée au fantastique et l'indécision qui règne concernant la place et l'existence des dieux, ce qui contribue au génie de l'oeuvre.
C'est une épopée, et c'est un chef d'oeuvre parce que l'oeuvre en question a le caractère indéfinissable du chef d'oeuvre : on le sent, on le sait, c'est presque irrationnel, mais c'est là.
Même si le début semble confus, qu'on ne sait pas bien où on va, qu'on est pour ainsi dire au coeur du début des conflits, il faut tenir le coup quelque 30 pages pour succomber à Salammbô. A lire, vraiment, c'est du Flaubert comme vous n'en avez jamais lu.