Après Le Postier, Souvenirs d'un pas grand-chose me confirme mon attachement à cet auteur dont je déconseille néanmoins les recueils de nouvelles. Le début est âpre et dur. Le jeune Chinaski, alter ego de Buko, est un enfant maltraité. On respire beaucoup mieux à partir de son adolescence. L'humour de Buko est assez particulier, il est recherché dans l'obscénité, bien dosé et pas grotesque pour un sou. De même, son personnage est assez complexe en terme de psychologie. Il y a énormément d'émotions, de la poésie, mais il n'est pas du tout analytique ni réflexif. Cette absence d'intellectualisme, je dirais même ce refus, va de pair avec un style qui multiple les petites ellipses, qui donne un dynamisme sans renier la profondeur. L'auteur donne à ressentir plutôt qu'à comprendre. Il ne s'explique ou ne se justifie jamais. Lecture très étrange, très puissante en émotion, bouleversante même, dont je n'ai pas vraiment compris les ressorts. Je me suis senti très proche de lui, presque comme un ami, alors que je suis convaincu que je détesterais le croiser à un dîner.