Au petit jeu des chansons pour sépulture, Hurt enterre tout le monde. A l'origine, il s'agit d'un titre de Nine Inch Nails sur l'album The Spiral, Trent Reznor se faufilant dans un son dément et abrasif, sur un texte bien sombre, qui ne respire pas franchement la joie de vivre. On y devine des allusions à la toxicomanie, la douleur et la perte...Une sorte de fin du monde ni plus, ni moins. Un point de non retour surtout. En 2002, Johnny Cash est au plus mal, sa santé décline et pire que tout, sa voix ne vibre plus comme avant, au point de le déprimer. Le producteur Rick Rubin lui envoie simplement les paroles, pour le toucher en plein coeur. Johnny Cash enregistre alors Hurt en acoustique à Los Angeles avant l'ajout de quelques overdubs pour accompagner sa voix cassée. Encore plus troublant, la vidéo ne laisse guère de doute sur la dimension crépusculaire, à tel point que beaucoup rechignent à la diff. Le couple Cash y apparait dans sa maison du Tennessee, tandis que des images d'archives retracent une vie américaine. Le Christ ne manque pas à l'appel d'ailleurs. Vieilli, Johnny Cash nous reçoit à sa table couverte de plats magnifiques, presque des natures mortes, avant de renverser un verre de vin, rouge comme le sang. Mais sa fille Rosanne insiste : «Tu es un artiste, c'est ce que tu fais, et tu dois le montrer.» Un ultime frisson nous traverse, lorsque Johnny Cash referme son piano, comme un dernier adieu avant l'obscurité. L'homme n'a plus que quelques mois à vivre, partant peu après son épouse June Carter Cash, qui apparait à ses côtés. Quant à la demeure, les flammes l'emportèrent ensuite dans les cendres. A l'époque, Johnny Cash reprit aussi Personal Jesus de Depeche Mode ; le groupe ne s'en est toujours pas remis. Nous non plus.