Astérix & Obélix: Le Combat remporté

Pour la 12ème épreuve d'Astérix dans le monde de l'animation, il était primordial que le petit gaulois moustachu ait une victoire aussi digne que celle remportée dans le Colisée.

Il y avait beaucoup de craintes à avoir en ce qui concernait Astérix & Obélix: Le Combat des chefs adaptée de l'album Le Combat des chefs puisque la série répétait le schéma du "menhir d'Obélix rendant Panoramix amnésique" déjà utilisé dans d'autres oeuvres d'Astérix connues.

Et encore, cette répétition n'était pas l'unique pression que représentait une adaptation de l'oeuvre aux tout petits coups de menhir de rien du tout.

L'idée d'une adaptation de l'album Le Combat des chefs ne date pas d'hier. Mais les diverses tentatives de l'oeuvre ont été chaotiques. En effet, les studios Belvision avaient presque réalisé une première adaptation de l'album simultanément avec les adaptations des albums Astérix le gaulois et La serpe d'or en 1967. Adaptations à l'animation approximative et aux dessins bien peu jolis. Le tout dans le dos de Goscinny et Uderzo. Quand les auteurs découvrirent le film Astérix le gaulois, ils furent furieux, non seulement de ne pas avoir prévenus de la production du film, mais aussi tellement horrifiés par le rendu final du film qu'ils allèrent jusqu'à exiger les destructions des prochains films d'animation Astérix en cours: Astérix et la Serpe d'Or et Le Combat des Chefs ayant été créés également avec trop peu de moyens.

Bon d'accord. On est d'accord pour le premier parce que vous l'avez payé, mais le deuxième, vous ne le finissez pas ! On ne veut pas ! Au point de vue de la technique, c'est épouvantable, c'est laid !

_comme quoi les conflits auteurs-producteurs ne datent pas des années 2010_

Vingt ans plus tard, alors que les films Astérix et la surprise de César et Astérix chez les Bretons avaient été des succès auprès du public, les Studios Gaumont possédant les droits d'Astérix à l'époque envisagèrent une nouvelle adaptation de Le Combat des chefs avec Pierre Tchernia comme scénariste. Mais, contrairement aux réalisateurs des deux précédents films (les frères Brizzi pour Astérix et la surprise de César, Pino Van Lamsweerde) ayant eu Pierre Tchernia à leurs côtés, Philippe Grimond réalisa le film sans Pierre Tchernia ayant quitté le navire. Philippe Grimond préféra privilégier Le Devin tout en y intégrant l'amnésie de Panoramix présente dans Le Combat des chefs qui sortit en 1989. Malheureusement, Astérix et le Coup du menhir sortant la même année que La Petite Sirène au tout début du Second Âge d'or Disney, le film fut un monumental flop.

En 2019, alors que le diptyque d'Astier Astérix le Domaine des dieux/Astérix et le Secret de la Potion magique rendent Astérix populaire après l'abominable Astérix et les Indiens, le sympathique sans plus Astérix et les Vikings et une série de films Astérix live catastrophiques (à l'exception du culte Mission Cléopâtre) une attraction 3D Attention Menhir fut créée pour le Parc Astérix lors des 30 ans du parc. Attraction reprenant une partie de l'histoire Le Combat des chefs mais pas une adaptation complète pour autant.

Pourtant, en 2018, une adaptation globale de Le Combat des chefs avait déjà été envisagée.

Après avoir vu sa sortie repoussée à deux reprises à cause de la pandémie ainsi que des problèmes de financement, cette nouvelle oeuvre sur l'univers du petit gaulois teigneux aux moustaches jaunes voit enfin le jour.

Onze ans après son arrivée dans la 3D...

_au moment où cette critique est écrite bien sûr, je précise au cas où cette critique serait lue après 2025_

...avec Astérix le Domaine des Dieux et Astérix et le Secret de la Potion Magique, Astérix quitte le monde des téléfilms et du cinéma pour entrer dans celui des séries et, surtout, du streaming en sortant sur nulle autre plateforme que Netflix dont la bonne réputation n'est pas à remettre en question.

_du moins à quelques exceptions près_

De plus, ladite série n'est pas réalisée par un prétentieux souillant l'univers d'Astérix en prétendant le respecter mais par nulle autre que Chabat lui-même nous ayant offert le cultissime Mission Cléopâtre. De plus, Chabat a fait appel à Fabrice Joubert ayant été animateur dans des films comme Un monstre à Paris ou encore Moi, moche et méchant.

Et qu'est-ce cela donne? Eh bien, Astérix & Obélix: Le Combat des chefs est vraiment excellent. Déjà, la 3D est bien plus réussie que dans Astérix et le Secret de la Potion Magique qui n'avait pas la splendeur de Astérix le Domaine des dieux.

_ce qui est honteux quand on sait que Astérix et le Secret de la Potion Magique est sorti cinq ans après Astérix le Domaine des dieux_

Les personnages sont bien plus expressifs, les couleurs ne sont ni trop ternes, ni trop flashy. Nous avons la sensation d'être dans le même tableau vivant qu'était Astérix le Domaine des dieux et une bonne ambiance est mise en place dès les premières secondes du premier épisode. Les Romains avancent vers le village gaulois, la potion magique est servie aux gaulois, le fameux...

Non Obélix, tu es tombé dans la marmite étant petit

...est prononcé. Et BAM, voilà que débute une bonne bagarre gauloise comme on les aime avec, toutefois, une nouveauté puisque de superbes onomatopées sont affichées à l'écran afin de faire sourire les fans de la BD que sont les Astérixologues. Certains diront sûrement...

"Ah mais c'est nul! Ils ont plagié l'idée de la série Batman des années 60 ayant déjà fait ça"

Ce qui serait de la mauvaise foi étant donné que le d'origine de Batman des années 60 est adaptée d'un comics étant aussi rempli d'onomatopées.

De plus, loin de l'humour daté des années 2000 vu dans Mission Cléopâtre, Astérix & Obélix: Le Combat des chefs fait de l'humour intergénérationnel en reprenant les jeux de mots originaux de la BD ainsi que de l'humour avec des références parlant aux générations des années 80 aux années 2020. Notamment une référence à l'attraction It's a small world étant la plus ancienne des Parcs Disneyland au niveau mondial la première version de ladite attraction ayant soixante ans.

_au moment où cette critique est écrite bien sûr_

En parlant de parcs d'attractions, on peut notamment citer l'installation d'un parc d'attractions représentant le jour du combat des chefs qui aurait, plus tard, servi d'inspiration pour créer le Parc Astérix. De plus, il y a également une référence à l'attraction Tonnerre 2 Zeus réputée pour son lot de sensations fortes.

Mais la série se limite-t-elle à des gags et à des références? Eh bien non. En plus de bien adapter la BD au point de rendre les personnages peu scrupuleux de l'album de base encore plus détestables que dans le d'origine, Astérix et Obélix: Le Combat des chefs nous montre à la fois les personnages connus comme on les a toujours aimé tout en les rendant plus faillibles et plus humain. La chose est évidente quand on voit l'épisode inspiré de l'album hors-série/une oeuvre audio étant Comment Obélix est tombé dans la marmite du druide quand il était petit. De plus, l'inspiration en question en ajoutant des backgrounds touchants pour Astérix et Obélix ayant des conséquences durant toute l'histoire. Background en question rendant Aplusbégalix le Gallo-Romain collabo encore plus détestable que dans la BD tout en étant à la fois le méchant comique et le méchant menaçant de l'album d'origine.

Par contre, le coup de faire du homard et des fraises des ingrédients-clés de la Potion Magique est inexcusable puisque dans l'album Astérix le Gaulois, Panoramix a dit

Le homard n'est pas nécessaire, mais ça donne du goût

En ce qui concernait les fraises, c'était un ingrédient-blague n'ayant jamais été utilisé pour la Potion Magique dans la BD originale. Mais revenons aux qualités.

Contrairement aux oeuvres précédentes, les disputes d'Astérix et Obélix ne sont plus limitées à des blagues (bien que certaines d'entre elles soient très drôles) mais peuvent aussi être dramatiques comme cela avait été le cas dans l'album Astérix et le chaudron.

Si la série a bien inventé des personnages originaux, elle ne commets pas l'erreur de mettre plus en avant lesdits personnages en question au prix d'évincer Astérix et Obélix. En effet, le format série permettant de développer davantage les personnages que dans le format cinéma, personne ne vole la vedette à personne tout en se démarquant pour le meilleur. Bonemine est plus sympathique et plus intelligente que dans la BD, nos villageois préférés nous faisant toujours autant rire comme Ordralfabétix et Cétautomatix se tapant toujours dessus pour des poissons pas frais ou encore ce pauvre Assurancetourix qu'on ne laissera jamais chanter. Abraracourcix parvient même à être à la fois le personnage comique de mauvaise foi que l'on connaît bien tout en ayant des moments touchants. Pour revenir à Bonemine, bien qu'elle et Abraracourcix aient toujours leurs disputes, ils sont un couple bien plus sain que dans la BD. On peut également en dire de même pour les couples mariés du village gaulois ayant tous des rapports bien moins toxiques que ceux qu'ils avaient dans la BD.

Par contre, pour ceux qui avaient aimé voir un Panoramix digne ayant été autre chose que le damoiseau en détresse de service dans Astérix Le Domaine des dieux et Astérix et le Secret de la Potion Magique, dans Astérix & Obélix: Le Combat des chefs, le druide est revenu à son rôle de base en devenant un amnésique à qui il faut faire retrouver la mémoire. Certes, il a aussi des moments dignes mais seulement dans le premier épisode et le dernier épisode.

De plus, le fait d'avoir remplacé Amnésix par un personnage féminin nommé Apotika pour du soi-disant progressisme est malhonnête puisque Amnésix était présent pour faire un gag. En donnant ce rôle à Apotika pour mieux l'évincer par la suite, impossible d'y voir autre chose que de l'hypocrisie. Néanmoins, cela est rattrapé par le fait qu'Apotika se montre plus utile qu'Amnésix avant son évincement. De plus, les gags concernant Apotika et Panoramix sont encore plus drôles que les gags concernant Amnésix et Panoramix.

En parlant de drôle, Astérix & Obélix: Le Combat des chefs a repris l'amnésie de Panoramix traitée de façon légère dans l'album de base et non pas de manière dramatique comme l'avait fait le film Astérix et le Coup du menhir adaptant un tiers de Le Combat des chefs et majoritairement Le Devin. L'un des meilleurs exemples de cela est le romain de l'arbre sur qui les diverses potions ratées de Panoramix avait des effets dévastateurs dans Astérix et le Coup du menhir alors que dans Le Combat des chefs et Attention menhir, les potions ont des effets comiques. Néanmoins, on peut regretter l'absence de la réplique culte...

Tant qu'il y a des marmites, il y a de l'espoir

...alors que l'attraction Attention menhir avait eu l'intelligence de garder cette réplique. Sans compter le fait que la série a adapté un gag de l'album Le Bouclier Arverne ne servant à rien scénaristiquement et retardant l'intrigue.

Pour en revenir aux personnages, le personnage original le plus réussi est Metadata. Metadata reprends le principe des romains naïfs découvrant le vrai visage de la Gaule ayant été représentés par la famille Petiminus, Dulcia et Apeldjus dans Astérix le Domaine des dieux. Sauf que là où les trois romains retardaient inutilement l'intrigue et étaient plus envahissants qu'autre chose, Metadata, elle, a un parcours de personnage intéressant puisqu'elle a soif de découvertes tout en étant endoctrinée dans un système dont elle ne voit pas les injustices et la rabaissant sans arrêt. Ce qui ne l'empêche pas, toutefois, de rester digne. De plus, à part le Centurion Fastenfurius (remplaçant ici le Centurion Langélus de l'album original) sans scrupules étant l'oncle de Metadata, personne ne la rabaisse pour le fait d'aimer porter des braies.

_qu'est-ce tu dis de ça La Rose et le glaive? hein, qu'est-ce que t'en dis?_

Malheureusement, le design de Metadata n'est pas digne de l'univers Astérixien. En effet, contrairement à des personnages comme Bonemine et Iélosubmarine ayant des physiques drôles car caricaturaux au même titre que les hommes du village, Metadata a un physique trop américanisé plus particulièrement son visage avec des grands yeux dignes des Princesses Disney des années 80, 90, 2000 et 2010. Dommage.

Parlons maintenant des voix. Si Iélosubmarine est interprétée par Barbara Tissier étant une comédienne spécialisée dans le doublage, le reste de la série n'est, malheureusement, composée que de star-talent. Si la plupart des acteurs s'en sortent bien (plus particulièrement Géraldine Nakache en Bonemine ou encore Anaïs Demoustier en Metadata), ça n'est pas le cas de tous. Gilles Lellouche en Obélix est une catastrophe: toujours en sous-jeu, récitant davantage son texte plutôt que de jouer un rôle. Ce n'était vraiment pas un bon choix de casting

-et il faut dire que prendre l'acteur ayant interprété Obélix dans ce qui est vu comme le pire film live Astérix n'aide pas_

En ce qui concerne Alain Chabat: il a beau ni être Roger Carel, ni être Jean-Claude Donda, il est tout de même bien meilleur que Christian Clavier s'étant joué lui-même dans Astérix et le Secret de la Potion Magique. On sent que l'expérience de Chabat ayant été la voix VF de Shrek lui a permis de savoir comment jouer des rôles de personnages d'animation. De plus, il est amusant d'entendre Alexandre Astier changer de camp: en effet, alors qu'il était Centurion Romain dans Astérix le Domaine des Dieux, il est devenu le poissonnier gaulois Ordralfabétix dans Astérix & Obélix: Le Combat des chefs. Quant à Thierry Lhermitte en Panoramix, il n'est pas merveilleux mais pas catastrophique pour autant.

Puisqu'on parle de voix, restons dans le domaine du son en parlant de la musique. Alors, comment dire? Ladite musique de la série est tout sauf mémorable. Mathieu Alvado a juste fait le minimum syndical en composant des musiques correspondant à l'ambiance sans toutefois faire des thèmes aussi mémorables que ceux de Gérard Calvi, Vladimir Cosma, Michel Colombier, Alexandre Azaria (ayant su s'imposer malgré la présence de chansons jeuns datées) ou Philippe Rombi. En effet, la série a fait l'erreur de privilégier des chansons en mode "musiques d'ambiance" plutôt que de faire quelque chose de réellement intéressant. Les seuls moments durant lesquels Mathieu Alvado s'est impliqué sont durant les deux derniers épisodes de la série étant les plus prenants.

Et le plus gros défaut de la série est le suivant: la présence de moments choupi-chou dispensables ayant été pensés pour les touts petits alors qu'on ne voyait pas du tout ce genre de chose dans les autres oeuvres Astérix (seuls des spin-off comme les aventures d'Idéfix se l'étaient permis).

Bref, une série globalement réussie malgré quelques défauts pouvant se voir plusieurs fois.