"Breaking Bad" repose sur une ficelle narrative étonnamment commode : ériger un protagoniste médiocre en figure tragique en lui octroyant une "bonne cause" pour justifier ses pires actions. Créer un personnage comme Walter White, un homme acculé par la maladie et le désir de protéger sa famille, n'exige pas une finesse psychologique exceptionnelle. C'est un levier émotionnel primaire et prévisible qui permet de susciter l'empathie initiale du spectateur, même face à des choix de plus en plus répréhensibles.
La série surfe habilement sur cette justification facile, transformant un ego blessé et une soif de pouvoir naissante en une quête altruiste dévoyée. On nous demande de croire à la complexité d'un homme dont la descente aux enfers est constamment masquée par le prétexte de la nécessité familiale. En réalité, Walter White n'est pas tant une exploration nuancée de la moralité qu'une illustration simpliste de la façon dont une "bonne intention" peut paver la voie aux pires atrocités.
Le génie supposé de la série réside en grande partie dans sa capacité à manipuler nos sympathies grâce à cette cause initiale. Or, un personnage dont les actions sont constamment légitimées par un impératif extérieur, aussi noble soit-il au départ, offre une fenêtre limitée sur la véritable nature humaine et la complexité des choix moraux autonomes. "Breaking Bad" brille par son suspense et ses performances, mais son personnage central, malgré l'acclamation, demeure un produit d'une facilité scénaristique déconcertante.