Critique de Daredevil (sans avoir vu un seul épisode, et c'est déjà trop)
Je n’ai pas vu Daredevil. Je tiens à le préciser d’entrée de jeu. Je n’ai pas regardé un seul épisode, et je n’en ai absolument pas l’intention. Ce que j’ai vu, en revanche, c’est la bande-annonce. Et c’est déjà plus que ce que je mérite.
Trois minutes. Trois longues minutes de ma vie que je ne récupérerai jamais. Trois minutes de grimaces dans l’obscurité, de dialogues marmoréens, de filtres sombres comme une cave à vin en deuil, et d’acrobaties de ninja aveugle qui m’ont fait regretter l’invention de la vidéo en streaming.
Esthétiquement, Daredevil ressemble à une version low-cost d’un rêve humide de Zack Snyder : tout est gris, noir, rouge sang, et dénué d’âme. On dirait un film d’action qui aurait oublié d’inviter la lumière, la subtilité et le bon goût. C’est laid. Objectivement laid. Même l’enfer serait mieux éclairé que la cuisine de Matt Murdock.
Mais le vrai danger, ce n’est pas l’ennui. C’est ce que cette série va faire aux gens. On va avoir une génération entière de trentenaires qui se prennent pour des justiciers urbains en col roulé. Des gens qui se battent dans des ruelles en criant "je rends justice" avec des écouteurs Beats et un bandeau rouge sur la tête. C’est le chaos annoncé. L’apocalypse urbaine par overdose de pose dramatique.
En résumé : je ne l’ai pas vue, je ne la verrai jamais, et je suis déjà fatigué rien que d’y penser. Daredevil, c’est peut-être le héros dont Hell’s Kitchen avait besoin, mais c’est surtout la série que personne n’aurait dû laisser sortir de la salle de montage.