J'avais une certaine appréhension à visionner cette série qui explorait un thème périlleux à développer dans un format série: la révélation de l'un des cannibales les plus mythiques du 7ème art, j'ai nommé Hannibal Lecter.
Les adaptations filmiques de l'histoire du célèbre psychiatre anthropophage sont de qualité variable: j'avais adoré le Silence des Agneaux ( traumatisant et fascinant à la fois) , un peu moins Hannibal( qui sombrait par moments dans le grotesque), encore moins le préquel "Les origines du mal".
Adapter le roman "Dragon Rouge" de Thomas Harris ( la série se déroule exactement avant les faits du livre) est une excellente idée et a déjà été transposé au grand écran par Brett Radner, pour un résultat mitigé ( mais pas complètement raté non plus). Après avoir "englouti" l'intégralité de la première saison, mon constat tient en un seul mot: TERRIBLE! Et terrible dans tous les sens du terme. Et ceci pour plusieurs raisons:
1. Le casting est juste impeccable, même si Mads Mikkelsen est clairement au dessus du lot avec son interprétation subtile de Lecter, qui supplanterait presque le jeu d'Anthony Hopkins dans le Silence des Agneaux. Le psychiatre ne laisse rien transparaître, est d'une élégance sans faille, use d'un phrasé délicat, mesure ses paroles avec une intelligence diabolique, concocte des recettes aux ingrédients effroyables ( pas de spoiler!)
Le personnage de Will Graham est aussi très complexe et intéressant et forme avec Hannibal un tandem maudit.
Tous les seconds rôles sont plutôt bons, Fishburne est juste et totalement aveuglé par les bonnes manières et les talents culinaires d'Hannibal. Même la psychiatre ( qui se la joue un peu trop psy fatale et shootée à mon goût par contre) de ce dernier ne décèle rien. L'équipe de profilers n'en fait pas trop.
D'ailleurs les enquêtes sont en réalité reléguées au second plan et ne sont qu'un pour l'évolution et la "prétendue" plongée vertigineuse de Will dans la démence. Le scénario joue sans cesse avec les hallucinations , la notion de réalité et de rêve éveillé dans une abondance d'effets spéciaux formant une sorte de mise en abyme de la folie.
2. L'esthétique de la série est extrêmement soignée ( presque trop diront certains), ces images ultra léchées tendent quasiment à rendre le macabre artistique, les couleurs se prêtent parfaitement à l'ambiance. La lumière est quasiment absente, ce qui ne fait que renforcer l'atmosphère sombre de l'intrigue, les mises en scène des meurtres sont très gores ( parfois insoutenables, Dexter c'est un épisode des Teletubies en comparaison) tout comme les nombreuses métaphores et délires fantastiques tout droits sortis de l'inconscient et des délires du protagoniste principal ( notamment la récurrence des cerfs, sublime et perturbante à la fois).
On reconnait instantanément le style de Bryan Fuller, qui avec Pushing Daisies dévoilait déjà son goût pour les univers irréels, magnifiques et glaçants à la fois. Hannibal s'enfonce encore davantage dans les limbes.
3. Malgré son sujet extrêmement glauque ( l''anthropophagie) , Hannibal ne verse jamais dans la boucherie-charcuterie gratuite et conduit prudemment sur une pente pour le moins glissante par son cheminement très progressif ( qui paraîtra peut être trop étiré à certains et je peux le comprendre).
Il s'agit sans conteste de l'une des meilleures séries du genre de ces dernières années dont j'attends la seconde saison avec impatience ( le final de la première fournée d'épisodes étant particulièrement haletant), imaginez une sorte de Criminal Minds ( qui est vraiment en dessous pour ce qui est de l'écriture) version Menu Maxi Best of Plus.