The White Lotus
7.3
The White Lotus

Série HBO (2021)

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Tout ça pour ça ? [Critique de The White Lotus saison par saison]

Saison 1 :

Tout le monde sait que les vacances sont l'endroit idéal et le moment parfait pour que les conflits familiaux et / ou entre amis de toujours explosent ou s'exacerbent. Sur ce lieu commun, Mike White nous propose une série (a priori une mini-série, mais il semble qu'une seconde saison dans un nouveau lieu et avec d'autres personnages soit désormais prévue...) où des touristes américains séjournant dans le cadre paradisiaque du White Lotus, un hôtel de luxe à Hawaï, se retrouvent confrontés soit les uns autres, soit à eux-mêmes, au vide ou aux contradictions de leur existence.

Nulle surprise à attendre donc de ce The White Lotus pourtant récompensée de nombreux prix, mais un défilé très drôle, souvent même jouissif, de personnes aux comportements ridicules ou haïssables, qui ne sont pas si différentes des nôtres, et un enchaînement habile de situations embarrassantes qui permettent au téléspectateur de se poser quelques questions importantes sur lui-même, sur ses propres choix de vie. C'est tout ? Oui, car on ne peut guère considérer le twist final autour du décès présenté au premier épisode comme un twist particulièrement intéressant. C'est tout, mais ce n'est pas si mal que ça, et ça garantit en tous cas beaucoup de plaisir au visionnage, en particulier grâce au formidable personnage du manager de l'hôtel (Murray Bartlett, très très convaincant dans un rôle qui aurait pu basculer dans l'excès), qui introduit une note d'étrangeté, voire de folie, qui enrichit clairement la série.

Le problème de The White Lotus, c'est plutôt que les scénaristes n'ont pas osé pousser leur logique plus loin (ou encore mieux, trop loin !), soit vers le chaos intégral - comme le faisait brillamment le génial Blake Edwards à partir de sujets assez similaires -, ou alternativement vers un vrai discours politique vis à vis de l'exploitation occidentale et de la déshumanisation de notre monde.

The White Lotus choisit plutôt la solution d'un happy end décevant, mettant en scène des réconciliations artificielles (les couples qui se déchiraient repartent ensemble, en dépit de toute logique...) et de nouveaux choix de vie improbables (on a du mal à adhérer à la véracité à la démarche de l'adolescent décidant de rester sur l'île...).

Alors oui, arrivés au dernier épisode, on se pose la question : tout ça pour ça ?

[Critique écrite en 2022]

Saison 2 :

Gros carton populaire de la fin de l’année 2022, la seconde saison de The White Lotus souffre pourtant de gros défauts qui rendent difficile à comprendre l'engouement général : rétrospectivement, on peut préférer la folie burlesque à la Blake Edwards de la première saison à cette seconde bordée d'épisodes tièdes, très tièdes, jusqu'à une conclusion effectivement réussie qui a certainement joué beaucoup sur les appréciations du public.

Cette seconde saison, située dans le cadre magnifique de la Sicile, à Taormina principalement, a clairement répondu aux attentes de la majorité des téléspectateurs en mettant en scène avec une certaine malice toute une brassée de poncifs : nos crises de couple (quand le sexe se fait de moins en moins fréquent dans la vie conjugale), nos désirs sexuels qui se combinent à nos frustrations (le partenaire de l'autre qu'on a envie de lui voler pour démontrer qu'on vaut mieux que lui / elle), notre soif de dépaysement (l'Italie, fantasme très répandu, en particulier aux USA) et notre... peur inexprimable de ce que “l’autre” peut nous réserver…

Et c'est bien sur ce dernier point que The White Lotus, qui avait pourtant nourri sa première saison à la culpabilité post-coloniale, devient franchement antipathique : car le centre des trois histoires qui constituent cette fois son scénario est fondamentalement cette paranoïa tellement US sur le fait que les "étrangers" en veulent à leur fric, et vous les arnaquer, voire les tuer, après les avoir éblouis par les charmes de leur "culture". Tous les Italiens ici sont des putes ou des escrocs, et ceux qui ne le seraient pas sont tout simplement odieux quand ils arrêtent d'être hypocrites. Ajoutons que pour Mike White et ses scénaristes, à qui l'on ne pourra certes pas reprocher d'être "woke", les homos - anglais, français ou italiens - sont des gens fourbes à qui il convient de ne pas faire confiance...

On se demande du coup ce que des acteurs de talent comme F Murray Abraham, Michael Imperioli, Tom Hollander ou Jennifer Coolidge sont venus faire dans cette galère, même s'ils nous font er de bons moments...

... et jusqu'où ira Mike White dans une troisième saison, probablement inévitable, maintenant qu'il a pu vérifier que ses préjugés et son idéologie rance sont amplement plébiscités.

[Critique écrite en 2022]

Saison 3 :

Tout le monde aime la série HBO, The White Lotus. Tout le monde ? Pas exactement, car quelques uns, dont j’avoue faire partie, résistent encore aux charmes douteux du petit jeu de massacre mi-jouissif, mi-déplaisant auquel se livre Mike White dans chacune des saisons de sa série-« hit ». Et, alors qu’on en est arrivé à la troisième, n’est-il pas temps de dégonfler un peu la baudruche The White Lotus ? Certainement… Et pourtant, diable, diable, ce n’est pas si facile que cela, car cette nouvelle histoire est peut-être bien la meilleure à date…

Pour ceux, de moins en moins nombreux, qui résisteraient encore à la création de Mike White, rappelons-en le principe. A chaque fois, l’action se e dans un « holiday resort » de luxe, sous la bannière « White Lotus », ou dans ses proches environs. A chaque fois, l’histoire commence par la découverte d’un corps, avant un flashback qui va nous expliquer comment on en est arrivé là, ce qui oblige le téléspectateur à un petit jeu pervers : celui de deviner qui finira mort à la fin des 8 épisodes, et dans quelles circonstances.

A chaque fois, la majorité des personnages sont de riches touristes, pour la plupart américains : une distribution de « monstres » réunissant les tares les plus communes de cette population archétypique, complétée par quelques locaux, représentant eux aussi les stéréotypes que l’on attend quand on pense à Hawaï (la première saison), à l’Italie (la seconde) ou à la Thaïlande (la troisième et toute nouvelle saison). White mélange donc la comédie satirique – étrillant les comportements et les modes de pensée des riches états-uniens – et la comédie de mœurs en général : un programme malin puisque, si l’on rit beaucoup aux dépens des « riches », tous ridicules ou abjects (un plaisir qui nous est refusé la plupart du temps dans la vie réelle), on finit toujours par s’identifier avec un ou plusieurs des personnages de l’histoire, quelles que soient notre propre nationalité et situation économique. Finalement, The White Lotus, c’est un peu comme feuilleter un vieux Paris Match en se moquant des parvenus ou des stars et starlettes en photo, mais en les enviant aussi. C’est humain, trop humain, mais pas très sympathique, en fait.

Mais le « petit problème » de cette nouvelle saison, qu’on aimerait descendre en flammes en se plaignant de la répétition systématique des mêmes mécanismes scénaristiques, des abus d’un léger mépris surplombant tout le monde, et de l’aspect « belle image touristique » qui fatigue assez rapidement (on n’est jamais loin de la pub pour le Club Med !), c’est qu’elle ne manque pas non plus de qualités. Et ces qualités résident dans une indéniable finesse dans l’écriture des personnages, magnifiée par une interprétation la plupart du temps excellente : difficile donc de critiquer trop violemment White, auteur complet de cette série qu’il écrit et dirige ! C’est du beau boulot, indiscutablement (même si l’on peut aussi trouver que la partie médiane de la saison est trop lente pour son bien, et tourne beaucoup en rond !).

Après, chacun d’entre nous sera plus sensible à certaines des « petites histoires » qui s’entremêlent, mais répétons-le, c’est en général l’interprétation qui fait la différence. Ici, Walton Goggins (The Shield, Fall Out) est meilleur que jamais, et compose un portrait souvent bouleversant d’un homme déchiré par un désir de vengeance qui le dévore littéralement. Mentionnons aussi l’excellente partition jouée par Jason Isaacs, très convaincant dans le rôle d’un businessman peu honnête, dont l’existence s’écroule silencieusement autour de lui pendant ses vacances (difficile de reconnaître le fade Lucius Malfoy de Harry Potter !). Et puis, parce qu’on sait combien c’est important dans la réussite d’un film ou d’une série TV, il y a de remarquables apparitions de seconds rôles, dont le toujours parfait Sam Rockwell, qui nous offre la plus grande scène de la saison avec son monologue « sexuel » extrêmement troublant, voire dérangeant. Et ça, ce n’est pas rien…

Bref, en dépit de mes réticences habituelles, j’ai marché. Et du coup, j’attends la quatrième saison avec ce qui s’apparente presque à de l’impatience !

[Critique écrite en 2025]

https://www.benzinemag.net/2025/04/12/max-the-white-lotus-saison-3-ter-repetita-placent/

7
Écrit par

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Créée

le 30 déc. 2022

Modifiée

le 16 avr. 2025

Critique lue 2.9K fois

18 j'aime

Eric BBYoda

Écrit par

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