Une histoire de liens et de sentiments qui échappent sans cesse aux mots ; qu'il s'agisse de nommer pour mieux catégoriser la nature même de leur relation, ou bien lorsqu'on cherche à verbaliser l'indéchiffrable douleur de la séparation, la parole peine à trouver sa place.
Et pourtant, le jaillissement est proche, le torrent d'émotions bout sous la chair, et l'on redouble d'effort pour le calmer, l'apprivoiser, le canaliser. Alors son expression s'adapte, se métamorphose, et prend une autre forme, à travers le corps et son mouvement. C'est un véritable élan de vie qui va animer ces corps sprintant à travers des champs fleuris, en course à bicyclette jusqu'à l'école ; mais aussi dans le calme de l'intimité, à travers le souffle d'un trampoline qui emmène jusqu'aux étoiles celui qui en perçoit la brise, ou encore la douce mélodie de Rémi ponctuée par sa respiration...
Et dès lors que cette respiration n'est plus, les corps se crispent : ils ralentissent, chutent et se brisent. On tentera, une nouvelle fois, de mettre des mots, mais ils paraîtront bien creux, déconnectés de toute réalité. Et que l'on discute de banalités pendant un diner ou que l'on évoque les qualités du disparu, l'affect reviendra à la charge. Ce n'est qu'une fois le corps éreinté, que l'amour pour l'autre finira par perler, et le deuil, enfin, pourra s'affronter.
La caméra de Lukas Dhont capte au plus près la vivacité de ses personnages, aussi bien dans l'amour que dans la colère. Et quand bien même on pourrait lui reprocher d'étirer en longueur son discours sans y apporter de réel renouvellement ou rebondissement dramatique, on ne peut que saluer la sensibilité avec laquelle il filme ses personnages, tous brillamment interprétés.