Comme tant de cinéastes de sa génération, Julia von Heinz, 47 ans, se sent attachée au é.
Bien quelle ait atténué les aspects anti-polonais du roman, parfois vivement critiqués en Pologne, les habitants de l'ancien appartement du père semblent toujours plus qu'étranges : une grande famille polonaise s'y est installée et nie désormais toute connaissance des précédents propriétaires juifs (tout en proposant à la vente le service à thé de l'enfance d'Edek).
Alors que Ruth croit qu'elle ne peut accéder au é qu'à travers des lieux et des choses concrètes, Edek refuse d'abord complètement. Il aimerait quitter la Pologne le plus tôt possible.
Au cours de leur voyage, après des moments d’émotion aux stations de la mémoire, tous deux comprendront qu’il n’existe pas une seule forme de mémoire. Et pour que chaque spectateur soit emmené dans ce voyage de découverte, Heinz fait hurler les violons et, à Auschwitz, un guide énumère l'étendue des destructions comme s'il assistait à une conférence.
Il est même fait mention du fait que Auschwitz a été inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO en 1979. Le film ne quitte ce mode explicatif didactique que très rarement – et c’est principalement grâce à Stephen Fry. Ses ancêtres maternels étaient des juifs hongrois, dont plusieurs furent assassinés à Auschwitz, ce qui donne aux scènes dans lesquelles Edek fait enfin face à la mémoire de son é des éléments presque autobiographiques. Il est dommage que des moments aussi touchants se perdent entre des scènes trop flagrantes dans lesquelles le é est abordé. « On ne peut pas se lasser de cette catastrophe », dit un jour Edek à Ruth, une phrase qui pourrait également être utilisée contre le cinéma allemand et sa préoccupation constante, mais généralement peu artistique, pour le Troisième Reich et l’Holocauste.
Traiter du é allemand est important et nécessaire– mais il faudrait que ce soit autrement que dans des films aussi conventionnels, clichés et didactiques que ce Voyage avec mon père.
Un souvenir pour terminer, lors de mes séjours fréquents à Jérusalem, il est rare que je ne me rende pas à Yad Vashem. Il y a quelques années, c‘était au mois de Mai, sur la erelle qui ret deux bâtiments, j‘ai entendu cette conversation (entre 4 personnes, en français)!
- C‘est pas mal…
- Oui, mais ils en font trop…
Vous apprécierez d‘autant mieux si vous avez été à Yad Vashem