Ne connaissant pas très bien la saga pourtant célébrée des enquêtes de l'inspecteur Erlendur, ni même les livres d'Indridason (mis à part l'inévitable "Cité des Jarres"), il m'a été forcément difficile de comprendre en quoi l'histoire de "Etranges Rivages" peut venir éclairer les œuvres précédentes, mais je ne pense pas que le lecteur néophyte - comme moi - se sente particulièrement frustré de ce fait : ce lent, sombre et froid récit d'un retour vers le é, ouvrant la possibilité du travail de deuil pour Erlendur, comme pour les derniers protagonistes de l'histoire de la disparition d'une jeune femme survenue bien des décennies avant, tient très bien la route tout seul, et pourvu qu'on ne s'attende pas à lire un "polar" typique, crée une sensation certaine d'envoûtement. La plume d'Indridason s'avère souvent inspirée par sa manière de chroniquer une nature rude au point d'être mortelle, et des vies tout aussi rudes, comme figées par le froid. Le lecteur se surprendra donc à dévorer ce court récit pourtant démuni de suspense et de situations "policières" en général, le semblant d'enquête qui est le centre (à moins qu'il n'en soit que le McGuffin, évidemment ?), et se retrouvera presque démuni devant une conclusion virtuose, qui, si elle offre la paix (définitive ? mortelle ?) à son héros qui a réussit à affronter sa culpabilité, se permet également d'abandonner dans l'obscurité des fjords hivernaux toute une partie du roman (la plus importante, sans aucun doute). Drôle de bouquin, dont on ne sait pas dire au final si on l'a vraiment aimé ou non. [Critique écrite en 2014]