"L'homme qui rit" a beau être l'un des romans les plus connus de Victor Hugo, et peut-être, avec "Les Misérables", celui qui a le plus inspiré les sphères littéraire et cinématographique, on aurait tort d'y voir un roman.
De son propre aveu, Hugo se fait ici à la fois romancier, philosophe, historien et poète. D'où la richesse incroyable de l'oeuvre au final.
"L'homme qui rit" est le premier volet d'une trilogie qui devait traiter, dans cet ordre, de l'aristocratie, de la monarchie et de la révolution. Si le troisième tome, "Quatrevingt-treize" a bien été produit, le roman sur la monarchie n'aura, quant à lui, jamais vu le jour.
Pour le lecteur qui pense aborder un "simple roman", "L'homme qui rit" risque d'ennuyer car ce grand drame social laisse la part belle aux analyses tantôt politiques, tantôt philosophiques et tantôt historiographiques d'un auteur très documenté et très averti. C'est d'ailleurs là un reproche qu'on peut faire à Hugo, lorsqu'il a fouillé un sujet à fond - et c'est son habitude -, il veut le restituer avec un peu de trop de minutie, ce qui alourdit globalement la narration.
Non pas que ses analyses soient inintéressantes, bien au contraire mais elles créent des longueurs, nous faisant abandonner les personnages pendant parfois des chapitres entiers. Au coeur de ces dissections qui se font dissertations, se trouvent des thèmes forts et universels : la destinée, le devoir et le pouvoir, le divertissement et le plaisir, l'amour, les vices et les vertus, la richesse et la pauvreté, la vérité et la justice, etc.
Enluminant le récit, la plume irable, miracle de finesse, de précision et de poésie tout à la fois. Absolument personne n'écrit comme Hugo, le poète se dissimule mal derrière le romancier. Sa puissance d'évocation n'est comparable à aucune autre, on est téléporté dans l'univers qu'il crée pour nous ; qu'il soit noir ou lumineux, peu importe, Hugo brille dans tous les registres.