Dans un futur dystopique est né « Panem ». Le pays est composé du Capitole, hégémonique, riche, futuriste, imposant un régime autoritaire et totalitaire, ainsi que des 12 districts, plus pauvres, qui l’alimentent en matières premières. Après une tentative de soulèvement des districts, qui aura laissé de graves séquelles aux deux parties, le Capitole a instauré les Hunger Games : chaque district envoie un garçon et une fille entre 12 et 18 ans, tirés au sort pour aller s’entretuer dans une arène.
D’une trilogie…
La trilogie Hunger Games a eu un succès retentissant, tant au niveau littéraire que cinématographique. Avec un rythme d’un an entre chaque tome (2008, 2009 et 2010), elle est adaptée en quatre films (et à mon sens, c’était un de trop) entre 2012 et 2015, donc encore une fois un an entre chaque.
S’attendait-on alors à ce qu’en 2019, on nous annonce que la saga allait s’élargir avec deux préquelles ? La trilogie originelle ne se suffisait-elle pas à elle-même ? Il s’agissait de livres pour « jeunes adultes », qui se suffisaient à eux-mêmes, qui avaient eu du succès et dont on avait majoritairement un bon souvenir. Voulait-on juste relancer la machine à billet? Ou l’autrice souhaitait-elle reprendre son univers, après avoir pu prendre un temps de recul, et lui donner plus de forme ?
… à un univers étendu ?
Quelles que soient les réponses à ces questions, on ne peut que se réjouir que Suzanne Collins ait décidé d’écrire ces deux préquelles.
La Ballade du serpent et de l’oiseau chanteur nous explique, à travers les personnages du (futur) président Snow et de Lucy Gray Baird lors de la 10ème édition, comment sont nés les Hunger Games… et quelles idées ont permis de les faire perdurer jusqu’à l’époque de Katniss, 64 ans plus tard. Il a eu une adaptation cinématographique en 2023.
Lever de soleil sur la moisson revient quant à lui sur la seconde « Expiation », jeux aux règles modifiées qui ont lieu tous les 25 ans. Il s’agit de la dernière victoire du District 12 (après la 10ème et la 74ème édition) qui n’avait pas encore été couchée le papier. Le livre va, d’une part, faire le pont entre les débuts des Hunger Games, lorsque les districts subissent de plein fouet la toute puissance d’un Capitole pourtant mal en point et la Révolte qui le fera tomber.
Mais du coup, le livre ?
Comme toujours, Suzanne Collins a une narration à la première personne, qui permet une forte immersion, et un attachement au personnage principal. Le livre est construit en trois parties, à l’instar du schéma tertiaire au théâtre. Si on a apprécié les ouvrages précédents, on se retrouve donc dans une zone de confort appréciable, et efficace.
Enfin, on obtient des informations sur Haymitch Abernathy (à vos souhaits), personnage très présent, mais dont au fond, on ne sait presque rien, si ce n’est qu’il avait gagné la deuxième Expiation de façon bizarre, puisque ce n'était pas rediffusé et que les participants de la 3ème Expiation n'avait pas pu avoir ces rediffusions là, qu’il avait sombré dans l’alcoolisme et la solitude.
Dans les premiers chapitres, on pourrait s'agacer de voir du name-dropping "gratuit", et s'étonner des liens que semble avoir Haymitch avec divers personnages, alors qu'il n'en est jamais réellement mention lors de la trilogie originelle. Certaines interactions font l'effet d'un fan service mal ajusté, et gratuit. Il faut arriver à er outre, la dissonance trouvant une explication dans la dernière partie du roman.
Du moins en partie. De mémoire, dans la trilogie originelle, Haymitch mentionne que la mère de Katniss soignait les gens de la Veine alors qu'elle venait d'un milieu plus aisé. Je crois que c'est la seule mention du fait qu'ils se connaissaient. Mais vu la fin du livre, ça ne manque pas de cohérence.
Par contre, les liens entre Haymitch et Beete, Mags, ou Wiress lors du second et du troisième tome me semblent vraiment sous exploités, me donnant l'impression qu'il s'agit d'un rajout à posteriori. Tout comme l'introduction d'Effie qui est superflue selon moi.
La partie sur la moisson et la préparation des Hunger Games est longue, et va nous amener a apprécier des personnages à priori antipathiques, permettant de remettre en question les opinions tranchées d'Haymitch à l'instar de Katniss qui a appris à connaitre Peeta, remettant en exergue les similitudes entre le futur mentor et sa protégée.
Pour les personnages du Capitole, Snow est bien entendu détestable à souhait, plus horrible que lors des 10èmes Hunger Games, où il y avait une ambivalence entre son côté détestable et sa relation avec Lucy Gray. Je suis étonné que son utilisation du poison soit aussi explicite.
Devant Haymitch, c'est cohérent, après tout, il pourrait s'en débarrasser dans l'arène, mais devant Plutarch qui vivra encore plus de 25 ans, ça me parait douteux. Lors du 3ème tome, ils utilisent cette information comme propagande anti capitole, mais s'il le faisait si peu discrètement, tout le monde le savait déjà non?
Pour ce qui est de l'arène, il y a un risque de rester quelque peu sur sa faim. Certains ages vont trop vite, d'autres sont parfaitement dosés.
Et surtout, la conclusion de ce livre, avec la victoire et ses conséquences. Avant les derniers chapitres, je ne savais pas comment me positionner sur ce livre. La fin m'a happé, les évènements inéluctables se rapprochant sans qu'on puisse les contrôler, l'impression d'être une marionnette dans un engrenage infernal qui ne peut être stoppé....
Note personnelle : 8. Une belle claque, qui par ailleurs fait vibrer une corde sensible.