Alphonse
6.4
Alphonse

Série Prime Video (2023)

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Alphonse par Ours-Bondissant

Note liminaire :

J'aurais mis un 7 ou un 8 à la série, mais vu les notes sanctions des moralistes en herbe qui jouent la carte du coup bas en se voulant influenceurs de statistiques à coups de 1 ou de 3, eh bien allons-y pour un 9 !


Avec son chapelet d'acteurs et d'actrices connus comme Pierre Arditi, Nicole Garcia, Charlotte Gainsbourg, et moins connus comme Marie-Christine Barrault ou Chantal Neuwirth et la qualité de leurs prestations, je ne vois vraiment pas ce qui justifie un déchaînement de mépris et d'adjectifs lapidateurs tels que j'ai pu en lire dans la presse (en général on a toujours peu ou prou droit aux mêmes : "réactionnaire", "vulgaire", "rance" (insulte aux accents distingués encore à la mode, qui le dispute parfois avec "sordide"), critique injustes qui frisent à mon avis la malhonnêteté intellectuelle.


Je trouve cette série vraiment drôle... et courageuse. Bien sûr ce goût affirmé du contrepied et du parfait décalage avec les thèmes chers aux cinéastes palmés quêtant les oscars de notre époque, ne pouvaient que déclencher l'ire de la presse bien pensante de gauche comme de droite, qui voit rouge dès que s'agite à l'horizon le chiffon rouge d'une critique à l'encontre de notre néo-féminisme national made in USA, fut-elle ironique et essayer d'être drôle (quelle infamie, vouloir faire rire sur un sujet aussi sérieux dont la même presse nous rabat les oreilles !) : un homme qui se fait tarter par sa femme et va faire la pute pour rembourser le crédit qu'il a contracté alors qu'il vient d'être licencié, c'est vrai que ça dissone un peu dans le chaste concert des films sociaux à prétentions revendicatrices que nous sert le cinéma français (le dernier en date "Anatomie d'une chute " a bien entendu été multi palmé-césarisé) depuis bon nombre d'années.

Parler de l'amour avec des femmes mûres, voire âgées, et les montrer belles, énergiques, amoureuses, audacieuses, s'am à intervertir les rôles ou plutôt la distribution des rôles tels que le cinéma le fait habituellement, il fallait oser, et le film le fait très bien et avec élégance, même si, par cabotinage ou par pudeur, son auteur ne peut s'empêcher de le faire entre deux répliques grossières. Et ce contrepied fait sacrément du bien, même si, comme tout effet facile, il tourne parfois à l'automatisme.

Le rôle de Pierre Arditi par exemple, en vieille pute raffinée, prodiguant ses conseils crus à un fils qui, malgré un physique avantageux, semble avoir beaucoup à apprendre dans le registre, en plus d'être parfaitement bien joué, est vraiment original. Les puritains à la morale bien droite n'ont pas manqué de s'attarder sur ce point, bien entendu ("Ô mon Dieu, mais il a dit "Ton talent, c’est ta bite", Seigneur quelle infamie !"), ignorant ou feignant d'ignorer que le personnage de Jacques se raccroche à la grossièreté pour se protéger de ses élans de tendresse envers son fils, comme dans cette scène du début du second épisode où après avoir commencé à s'épancher sur la femme qu'il aimait, et à se confier à son fils, il se reprend, et coupe court à l'évocation du é par un franc retour au présent et un dernier conseil technique bien graveleux.

Mais s'attarder sur ces ages de grossièreté assumée, comme dans le cas d'un mensonge par omission, c'est surtout ignorer la qualité des dialogues et l'esprit des répliques qui pourtant foisonnent. Et c'est ce qui me faisait parler au début de malhonnêteté intellectuelle à l'égard de la critique, de Télérama à Libération en ant par Le Monde ou L'Obs : on pointe du doigt un des ressorts de la machine scénaristique, le plus saillant, le plus facile à mettre en exergue, en feignant d'ignorer le rôle qu'il joue dans l'ensemble du film et dans le portrait des personnages qu'il dessine qui eux, sont très nuancés et ne manquent pas d'élégance.

Celui de Margot, en plus d'être très bien joué Charlotte Gainsbourg, est tout aussi décalé. Évidemment, ce rôle de femme dominante, partageant le même goût pour la boxe que son mari, et le tartant à l'occasion en lui lançant des "mais vas-y, frappe !", puis reconnaissant qu'elle est peut-être un peu trop dure ne peut, dans le credo actuel de la femme-victime/mari violent, qu'être vu comme une espèce de corps étranger, de xénomorphe à censurer de suite - et l'on comprend les cris d'orfraie qui piaillent ici et ailleurs.


Et même si la série, tout comme Alphonse, semble s'essouffler parfois au fil des épisodes (...oui je sais, c'était facile) et prend une tournure rocambolesque tous comptes faits bien prévisible - j'aurais préféré qu'elle continue à flirter avec le sérieux voir le grave, qui est à mon avis la marque des meilleures comédies, plutôt que de verser parfois dans la farce - , elle n'en demeure pas moins pleine d'esprit, et de ce fait très recommandable.


9
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le 29 mai 2024

Critique lue 29 fois

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Ours-Bondissant

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