Parthenope
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Parthenope

Film de Paolo Sorrentino (2024)

Chef-d’œuvre ou exercice de style ...

Paolo Sorrentino ... ce cher poète du spleen napolitain qui filme la vie comme un songe et les songes comme une publicité de parfum hors de prix. Avec Parthenope, il récidive, et le pire, c'est qu'on savait très bien qu'il allait récidiver. Des plages dorées, des corps sculptés, des dialogues où chaque phrase semble écrite pour être gravée sur une plaque de marbre. Et bien sûr, cette lumière, cette inable lumière méditerranéenne qui transforme chaque plan en une carte postale envoyée depuis l’au-delà.


Sorrentino filme Naples comme un touriste mélancolique qui aurait lu trop de Proust mais pas assez de journaux. Parthenope, l’héroïne éponyme, erre dans ce décor léché, oscillant entre la contemplation philosophique et le mannequinat involontaire. La jeunesse dorée qui l’entoure ? Un défilé d’ectoplasmes verbeux qui parlent de la vie comme s’ils avaient déjà tout vécu, alors qu’ils peinent à choisir entre un Negroni et un Americano.


Et puis, bien sûr, viennent les monologues existentiels, ces grandes envolées lyriques où un personnage, cigarette au bec, explique avec gravité que la beauté est une malédiction, que le temps est un assassin, que l’amour est un mirage… On en attendrait presque qu’un serveur en arrière-plan lève les yeux au ciel avant d’apporter l’addition.


Visuellement, Sorrentino est inattaquable. C’est bien ça le problème. Chaque plan est un chef-d’œuvre, chaque cadre une peinture digne du Louvre. Mais à force de sculpter la perfection, il oublie peut-être un détail : la vie, la vraie, déborde, elle tache, elle bave sur les bords du cadre. Ici, tout est trop composé, trop soigné, comme si chaque personnage attendait son tour pour réciter sa tirade et repartir dans l’ombre.


Et pourtant, malgré tout, on regarde. Hypnotisés, fascinés, agacés. Parce qu’aussi agaçant soit-il, ce film est du cinéma. Pas du cinéma vivant, pas du cinéma qui bouscule, mais du cinéma comme un parfum capiteux : enivrant, entêtant, parfois écœurant, mais impossible à ignorer.


Parthenope, c’est un peu comme un plat dans un restaurant étoilé : sublime en apparence, mais on ressort avec une étrange sensation de faim. On y reconnaît le talent de Sorrentino, son goût pour le sublime et l’absurde, mais on finit par se demander si l’on n’a pas déjà vu tout ça, ailleurs, en mieux.


Alors, chef-d’œuvre ou exercice de style ? À vous de voir. Mais une chose est sûre : Sorrentino ne changera jamais. Et c’est bien pour ça qu’on l’aime... ou qu’on le déteste.

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le 13 mars 2025

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Le-Général

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