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Le sang ne crie plus. Il s’infiltre. Il stagne. Il ronge. Dans A Working Man, David Ayer fait mine de brosser le portrait classique d’un vétéran rangé qui reprend les armes. Il ment. Ce n’est pas un film d’action. C’est une dépression armée. Levon Cade (Jason Statham), ancien militaire recyclé en ouvrier de surface, abat des cloisons la journée, reconstruit son honneur le soir, et tente entre deux silences de protéger sa fille (Isla Gie), seule étoile encore vivante dans un ciel trop bas. Son regard dit tout : ce monde ne mérite plus rien, mais il le gardera debout. Pour elle.
Ayer n’illustre pas : il dissèque. Il ne filme pas la violence, il la laisse s’infiltrer dans les interstices — regards, silences, corps en suspens. On est à mille lieux du Statham pop-corn. Ici, l’homme cogne par nécessité, pas par style. Chaque coup est une dette. Chaque baston, une lettre de suicide. La ville n’a pas de nom, elle est tous les lieux laissés-pour-compte, tous les cimetières de rêves pavillonnaires. Le gris domine, les rues bavent, les entrepôts hurlent en sourdine.
Jason Flemyng et Maximilian Osinski incarnent les frères Kolisnyk, seigneurs d’un trafic slave qui suinte la saleté mondialisée. Ils sont glaçants car crédibles : pas des caricatures, des professionnels. David Harbour, en vieux marine revenu de tout sauf de lui-même, joue Gunny Lefferty, mentor mutilé, miroir brisé du héros. Face à lui, Statham serre les poings sans jamais hausser la voix. Et ça suffit. On y croit. Michael Peña campe un flic fatigué par ses principes, Noemi Gonzalez une femme en ruines qui refuse de plier. Tous existent.
Le rythme est lent, rugueux. Pas de solo de violon. Pas de ralenti sur fond de vengeance. Juste des hommes qui marchent dans la boue, la tête basse. Les scènes d’action sont brèves, sales, sans emphase. Ayer filme l’usure, la sueur, le sang qui colle sous les ongles. Le travail de l’image épouse cette austérité : teintes délavées, ombres épaisses, rien ne flatte. Le film gratte. Il ne cherche pas l’effet, il vise la trace.
Working Man n’a pas de héros. Il a des rescapés. Et un dernier regard vers le hors-champ, là où les hommes vrais disparaissent sans faire de bruit.